La voix dans tous ses états
Polyphonie littéraire et imaginaires de la voix spectrale chez Fédor Dostoïevski
Résumé
Cet article a pour but de replacer la poétique de la polyphonie, propre à l’œuvre de Fédor Dostoïevski, dans une histoire culturelle du xixe siècle. Il s’agit donc de considérer dans cette œuvre la superposition de plusieurs imaginaires de la voix. Chez l’écrivain russe contemporain de l’invention du phonographe, les voix présentent souvent un aspect fantomatique et spectral que met particulièrement en évidence l’étude du récit Bobok (1873). Publié en amont des théories de Mikhaïl Bakhtine sur la pluralité des voix, ce texte permet de souligner la transversalité du motif des hallucinations auditives chez Dostoïevski. La reprise des théories spirites dans le récit peut nous apparaître enfin comme une réponse ironique aux accusations de folie dont Dostoïevski lui-même commence à faire les frais dès les années 1870. Cette réponse fictionnelle aux attaques du journal La Voix se double d’une critique des nouvelles conditions médiatiques dans lesquelles Dostoïevski produit son œuvre en général. Avant même l’invention du phonographe, la voix spectrale devient une allégorie du mot imprimé et le signe d’une entrée définitive de la littérature russe dans l’ère médiatique.
Abstract
This article aims to situate Fyodor Dostoevsky’s poetics of polyphony in the historical perspective of cultural evolutions during the nineteenth-century. It is therefore necessary to consider the coexistence of different “imaginations of voice” in Dostoevsky’s work. Like his contemporary Thomas Edison, the inventor of the phonograph, Dostoevsky creates voices that are endowed with a ghostly and spectral aspect, which is particularly highlighted in the study of his short story entitled Bobok (1873). Published before Mikhail Bakhtin had considered the plurality of voices in Dostoyevsky’s work, this text emphasizes the transversality of auditory hallucinations in his novels. The fictionalization of spiritualist theories in the narrative can therefore appear as an ironic answer to the accusations of madness that the author was the victim of in the early 1870s. His fictional response to the attacks of the liberal newspaper “The Voice” came along with a critique of the new conditions in which Dostoevsky had to produce his work at the age of media. Even before the invention of the phonograph, the spectral voice thus had become an allegory of the printed word and the sign of the definitive entry of Russian literature into the era of the media.
Texte intégral
1Dans un article intitulé « Pourquoi Dostoïevski nous est-il cher ? (À l’occasion des trente ans de sa mort) », l’écrivain et philosophe russe Vassili Rozanov évoque en ces termes ses sentiments du mois de février 1881 en apprenant la nouvelle du décès de l’écrivain :
« Dostoïevski est mort » : donc je ne pourrai jamais le voir en chair et en os ? et je n’entendrai jamais le son de sa voix ! Car c’est bien ça le plus important : la voix dit tout d’un homme… Non pas les yeux, ces « yeux rusés », ni les lèvres, ni la forme de la bouche, où se raconte la biographie, mais la voix, c’est-à-dire ce que l’on reçoit à sa naissance de son père et de sa mère, par conséquent de la nuit des temps, de toute la profondeur des étoiles (Rozanov 530, notre traduction).
2En se remémorant cette pensée, Rozanov tente d’exprimer le cœur d’une expérience de deuil singulière, celle liée à la mort de l’écrivain préféré. En effet, l’auteur des Frères Karamazov n’a laissé derrière lui aucune trace enregistrée de sa voix. Le seul accès à la matérialité du parler dostoïevskien dont nous disposons, ce sont les témoignages de ses contemporains qui ont brossé le portrait de l’écrivain lors de ses lectures publiques. Parmi ces témoignages, un journaliste présent lors du fameux « Discours sur Pouchkine » prononcé par Dostoïevski à Moscou le 8 juin 1880 livre ses impressions :
J’entends à nouveau cette étrange voix de ténor, haute, pleine de force nerveuse, qui, en émettant un premier son légèrement fêlé, réussit à enchaîner l’attention d’une salle figée dans un silence de mort au moment de scander nettement et distinctement :
– Pouchkine est une manifestation extraordinaire, et peut-être un phénomène unique, de l’esprit russe, a dit Gogol. J’ajouterai pour ma part : une manifestation prophétique.
Il prononça soudainement le mot prophétique en soulignant le son « o » (malgré sa prononciation à la manière moscovite) comme s’il frappait les voyelles avec un marteau. Et Dieu sait ce qu’elle contenait en elle, cette voix, mais nous tous, toute la salle, nous avons ressenti que parmi nous venait de prendre la parole un homme qui avait effectivement le doit d’« ajouter » quelque chose à ce qu’« avait dit Gogol » (Amfiteatrov 509, notre traduction).
3Le témoignage d’Alexandre Amfiteatrov ne peut transmettre qu’un écho affaibli de la performance réelle de l’orateur. Les lectures publiques de Dostoïevski semblent avoir joué un rôle non négligeable dans la construction de son image de prophète. À l’approche du bicentenaire de sa naissance, les nombreux lecteurs de Dostoïevski peuvent se demander ce qu’il reste de cette voix désormais disparue et, peut-être, interroger leur propre désir d’écoute. Appliquées à la mémoire de Dostoïevski, ces questions nous paraissent d’autant plus pertinentes que la survie du matériau vocal fait l’objet chez ce dernier d’un travail de fictionnalisation, l’œuvre conférant à la matérialité de certaines voix un caractère résolument spectral.
4Notons qu’en février 1881 l’enregistrement de la voix de Dostoïevski était déjà concrètement rendu possible par les avancées de la technique. La mort de l’écrivain survient quatre ans après la première démonstration publique des capacités du phonographe, invention de l’ingénieur américain Thomas Edison. Contrairement à son contemporain Léon Tolstoï, dont on peut encore écouter la voix enregistrée sur le phonographe que lui offrit Thomas Edison lui-même en 1908, Dostoïevski n’a prêté aucune attention à cette nouvelle technologie. L’auteur russe passe cependant, depuis la parution d’un célèbre ouvrage de Mikhaïl Bakhtine, pour le créateur d’une forme inédite de ventriloquie littéraire. Pour le critique soviétique, « la pluralité des voix et des consciences indépendantes et distinctes, la polyphonie des voix à part entière, constituent en effet un trait fondamental des romans de Dostoïevski » (Bakhtine 33). Sans revenir sur les enjeux théoriques de la métaphore musicale chez Bakhtine ni sur ses implications pour la théorie de l’« intertextualité » (Kristeva 146), il s’agit de nous interroger sur les différents imaginaires de la voix spectrale qui président à l’invention par Dostoïevski de ce mode d’écriture contrapuntique. Trois matrices historico-culturelles retiendront particulièrement notre attention : liée à l’essor de la clinique aliéniste et aux développements de la psychologie scientifique, la première semble inscrire le dialogue polyphonique dostoïevskien dans un imaginaire médical de la voix hallucinée ; la deuxième matrice culturelle renvoie aux croyances spiritualistes d’une époque, les années 1860-1870, où s’opère en Russie la diffusion des pratiques d’écoute médiumnique ; la troisième matrice questionne le passage du médiumnique au médiatique en nous rappelant que la polyvocalité dostoïevskienne s’ancre toujours dans un support, le journal imprimé, objet culturel traversé lui aussi, en cette seconde moitié du xixe siècle, par le deuil de la voix vive.
Voix hallucinées
5Avant de devenir lui-même un cas pour la clinique psychiatrique et psychanalytique, Fédor Dostoïevski passe pour être un remarquable clinicien. La récurrence des cas d’hallucinations auditives décrites dans son œuvre atteste les affinités qui existent au xixe siècle entre les domaines de la médecine, de la psychologie et ceux de la création littéraire.
6Dostoïevski possédait dans sa bibliothèque une édition du grand ouvrage en deux volumes d’Hippolyte Taine, De l’intelligence (1870), traduit en russe dès 1872 par le critique littéraire proche de l’écrivain Nicolas Strakhov. La présence de ce livre au chevet de l’auteur de Crime et châtiment semble attester sa connaissance des principaux développements de la psychologie scientifique de son temps et, plus particulièrement, de son intérêt pour les travaux des aliénistes français. Au centre de son livre, Hippolyte Taine pose une thèse paradoxale en affirmant que « la perception extérieure est une hallucination vraie » (Taine 10). Dans De l’intelligence, l’auteur s’intéresse aux différentes facultés mentales qu’il choisit, à la suite de Condillac, de faire dériver d’un même fait primordial : la sensation. Pour Taine, la perception extérieure n’est finalement que la rencontre d’une impression ancienne venue s’inscrire dans la mémoire pour former une image mentale, et d’une sensation actuelle, celle-ci ayant pour fonction de confirmer ou de rectifier l’impression ancienne projetée sur la situation extérieure.
7La notion même d’« image mentale » indique un certain primat de l’image optique sur la sensation auditive. Dans son traité Des maladies mentales (1838), le médecin français Étienne Esquirol a forgé le concept d’hallucination en envisageant celle-ci comme une expansion de l’expérience onirique sur l’état de veille : « L’homme donne alors un corps aux produits de son entendement. Il rêve tout éveillé » (Esquirol 192). Au fil de sa réflexion, le célèbre aliéniste évoque de nombreux visionnaires. Il décrit également plusieurs cas d’hallucinations auditives dont celui d’un ancien officier de l’armée napoléonienne, M.N., devenu son patient en 1815 :
Après deux mois environ, il paraît désirer que je prolonge mes visites ; je m’avise d’appeler les voix qui le poursuivent des bavardes ; ce mot réussit, et à l’avenir, il s’en sert pour exprimer leur horrible importunité. Je me hasarde à lui parler de sa maladie et des motifs de son séjour ; il me donne beaucoup de détails sur tout ce qu’il éprouve depuis longtemps ; […] il réfute mon opinion sur les causes de ses voix, il me rappelle qu’on montrait, à Paris, une femme dite invisible, à laquelle on parlait, qui répondait à distance. « La physique, disait-il, a fait tant de progrès qu’à l’aide de machines parlantes, elle peut transporter la voix très loin » (Esquirol 163).
8L’intérêt d’un tel cas réside dans le fait que l’interprétation des « bavardes » contienne déjà en germe le fantasme de la Sprachmaschine, bientôt concrétisé par l’invention de la télégraphie, du gramophone et enfin du téléphone. Un imaginaire technologique de la voix hallucinée émerge dans ce texte d’Esquirol qui annonce l’avènement des télécommunications modernes. Cet imaginaire fait également écho au goût invétéré du public parisien pour les phénomènes surnaturels et autres spectacles de ventriloquie sur lesquels viendront s’épanouir, à partir du milieu du xixe siècle, la vogue des médiums et des séances de spiritisme.
9La notion d’image auditive se retrouve enfin chez le disciple d’Esquirol, Louis-Francisque Lélut, dans l’ouvrage que celui-ci consacre dès 1836 au Démon de Socrate. Dans son étude, Lélut tente de démystifier la rationalité du plus célèbre philosophe de l’antiquité en affirmant la nature symptomatique et, pour tout dire, hallucinatoire de la mystérieuse voix intérieure dissuasive que Socrate appelait son daïmon. L’aliéniste identifie chez Socrate une disposition à « prendre les inspirations de sa conscience pour la voix d’un être surnaturel » (Lélut 155) avant de conclure :
Cette pensée, trop vive, trop ardente, trop disposée à se porter à l’extérieur, à se revêtir d’un corps, à devenir une image ou, tout au moins, une sensation auditive, prit en effet cette dernière forme, et alors furent tout à fait commencées les hallucinations de Socrate, c’est-à-dire l’espère de folie la plus irréfragable (Lélut 155).
10L’histoire de France fournira bientôt aux aliénistes une autre figure d’hallucinée célèbre en la personne de Jeanne d’Arc. Dans tous ces cas, une conversion du discours intérieur en image s’opère dans la psyché de l’aliéné : celle-ci confère aux voix hallucinées une dimension à la fois sensible et spectrale. Ce passage de la voix à l’image se retrouve également chez Dostoïevski.
11L’exploration littéraire des territoires de la maladie mentale débute chez cet écrivain en 1846 avec la parution du Double. Notons que dès le deuxième roman de Dostoïevski, l’autre Monsieur Goliadkine ne se donne pas d’emblée sous la forme d’une image visuelle. Sa première apparition sur le quai de la Fontanka prend l’aspect d’une sensation auditive, d’une parole ou plutôt d’une amorce de phrase :
Soudain… soudain… il tressaillit de tout son corps et, malgré lui, bondit de deux pas en arrière. Empreint d’une inquiétude indicible, il se mit à regarder autour de lui ; mais il n’y avait personne, il n’était rien arrivé de spécial – pourtant… pourtant, il venait d’avoir l’impression qu’il y avait eu quelqu’un, là, au moment même, à la seconde, qui s’était tenu là, près de lui, à côté de lui, lui aussi accoudé à la rambarde du quai – chose incroyable ! – qu’il lui avait même dit quelque chose, lui avait dit quelque chose très vite, d’une voix précipitée, pas tout à fait compréhensible, mais quelque chose qui lui était proche, quelque chose qui le concernait (Dostoïevski 2015a, 228).
12Dans cette « première confession dramatisée » (Bakhtine 279) écrite par Dostoïevski, l’hallucination projette la parole intérieure du personnage en images. Cette « voix précipitée » surgie de nulle part transforme la conscience en polyphonie, c’est-à-dire en dialogue externe. Un certain primat de la voix, et partant du dialogue, sur la description physique des personnages continue, à partir du Double, de traverser tous les romans ultérieurs de Dostoïevski. Il suffit de mentionner les difficultés auxquelles se heurte Stavroguine pour décrire ses hallucinations nocturnes en arrivant dans la cellule du starets Tikhone. Alors qu’il s’apprête à lui livrer le texte imprimé de sa confession, le héros des Démons (1871) mentionne d’étranges visites :
[…] il raconta qu’il était sujet, surtout la nuit, à un certain genre d’hallucinations, qu’il voyait parfois, ou qu’il sentait à côté de lui une sorte de créature rageuse, moqueuse et « raisonnable », « en différentes figures, différents personnages, mais c’est toujours la même chose, et moi, j’enrage toujours… » (Dostoïevski 2016a, 898)
13L’hallucination chez Dostoïevski est constituée avant tout de langage : elle se présente d’abord sous la forme d’une parole interne rendu progressivement sensible et audible à mesure que celle-ci réapparaît à l’extérieur. Le visible, quant à lui, n’intervient jamais que dans un second temps. Cette réflexion sur les rapports entre hallucination, voix et image se prolonge jusque dans le dernier roman publié. Le chapitre des Frères Karamazov intitulé « Le diable. Le cauchemar d’Ivan Fiodorovitch » oppose l’orgueilleux Ivan Karamazov à l’image bouffonne d’un diable qui rêve de s’incarner dans une « marchande de cent-vingt kilos » (Dostoïevski 2013с, 1637). Et le cadet des frères Karamazov d’affirmer au bord de la folie : « Tu es mon hallucination. Tu es l’incarnation de moi-même, mais d’un seul de mes côtés, du reste… de mes pensées et de mes sentiments, mais des plus dégoûtants et des plus bêtes » (Ibid., 1636). Incarner une partie de soi et la projeter vers l’extérieur en lui donnant l’aspect d’une voix, tel est le sens fondamental du dédoublement dostoïevskien.
14L’hallucination ajoute au réel une voix désincarnée. Celle-ci peut néanmoins prendre la forme d’un cri, c’est-à-dire d’un état de la voix ancré dans la puissance brute du corps. À l’intérieur d’un court texte autobiographique, publié en novembre 1876, Dostoïevski renouvelle sa description clinique du phénomène. Le Moujik Maréï raconte un souvenir d’enfance dont se serait souvenu Dostoïevski lors de son séjour au bagne d’Omsk. Perdu dans une forêt du domaine familial de Darovoïé, l’écrivain alors enfant croit entendre crier « Au loup ! ». Il se réfugie dans un champ où l’accueille la figure maternelle du moujik Maréï :
Je finis par comprendre qu’il n’y avait pas de loup et que ce cri : « Au loup » avait été une hallucination. Ce cri était, du reste, tellement clair et distinct, mais des cris de ce genre (et pas seulement sur les loups), j’avais déjà eu l’impression de les entendre une ou deux autres fois, et je le savais. (Ensuite, avec l’enfance, ces hallucinations passèrent) (Dostoïevski 2013a, 676).
15Unique dans l’œuvre de Dostoïevski, cet aveu autobiographique donne matière à alimenter le passionnant dossier médical dont l’écrivain a pu lui-même faire l’objet durant sa vie et surtout après sa mort. C’est sur le portrait d’un journaliste alcoolique taxé de folie que s’ouvre d’ailleurs le récit Bobok, publié en février 1873 dans le journal Le Citoyen. Les spectres carnavalesques mis en scène dans ce texte nous invitent néanmoins à sortir du domaine de la littérature clinique et psychologique pour considérer le deuxième imaginaire de la voix qui parcourt l’œuvre dostoïevskienne.
Voix fantomatiques
16Considérée par Bakhtine comme un « microcosme de l’œuvre tout entière » (Bakhtine 195), la nouvelle Bobok confirme le fait que les représentations de la voix s’ancrent presque toujours chez Dostoïevski dans une corporéité paradoxale. Tour à tour spectrales et hyperboliquement incarnées, les différents timbres qui composent le dialogue de Bobok viennent faire écho au vaste mouvement spiritualiste qui passionne l’élite culturelle russe des années 1860-1870.
17Bobok fait partie des premières livraisons du Journal d’un écrivain, une rubrique hebdomadaire qui deviendra, à partir de l’année 1876, une publication autonome dirigée par Dostoïevski. Lors d’une promenade dans un cimetière, le narrateur, un journaliste alcoolique prénommé Ivan Ivanovitch, se trouve face à des phénomènes inédits : « Je commence à voir et à entendre des choses étranges. Des voix, on ne peut pas dire, non, mais comme quelqu’un, tout près : “Bobok, bobok, bobok !” » (Dostoïevski 2016b, 933). Une multitude de sons, d’onomatopées et bientôt des voix individualisées commencent à se livrer à une débauche d’analyse philosophique et psychologique. Les hallucinations auditives d’Ivan Ivanovitch sont ponctuées par une série de révélations scandaleuses, le récit fantastique présentant des affinités certaines avec quelques-unes des grandes scènes de confession qui jalonnent les romans de la maturité. Retenus entre la vie et la mort par un mystérieux phénomène physique, les voix d’outre-tombe de Bobok se jettent un défi : « n’avoir plus honte de rien » (Ibid., 947) en se racontant pour passer le temps « biographies et toutes sortes d’anecdotes » (Ibid., 948). Cette manière typiquement dostoïevskienne de « [se] dépouiller, [se] dénud[er] » (Ibid., 946) avec des phrases évoque le processus matériel de décomposition des cadavres. Tout au long de sa nouvelle, Dostoïevski n’a de cesse de chercher le bon qualificatif pour identifier ces voix, pour les discerner les unes des autres : « sérieuse », « mielleuse », « flatteuse », « arrogante » (Ibid., 936), chaque parole a son timbre propre et sa personnalité. « Il y avait dans le timbre de sa voix quelque chose de capricieux et d’impérieux » (Ibid., 941), précise un endroit du texte. Ailleurs, il est question du « son un peu rauque d’une voix de jeune fille » où s’entend « quelque chose comme la piqûre d’une aiguille » (Ibid., 944). Le dialogue des fantômes sera finalement interrompu par un éternuement du narrateur.
18Ce récit carnavalesque présente des affinités évidentes avec une pratique particulièrement en vogue durant les années 1860-1870 : la séance de spiritisme. Apparue d’abord aux États-Unis dans les années 1840 puis rapidement diffusée en France, en Angleterre et enfin en Russie, la mode des tables tournantes se développe sur un ensemble de croyances et de doctrines diffusées depuis la fin du xviiie siècle : mesmérisme, swedenborgisme etc. Cette manière d’entrer en communication avec les morts se répand en parallèle de la télégraphie électrique, ce qui ne manque pas de susciter d’emblée, chez les auteurs spirites, certaines analogies. Le Livre des Esprits du mystique français Allan Kardec dote en 1857 les pratiques médiumniques d’une théorie censée réconcilier science et métaphysique en postulant la survie immatérielle des morts. Si Dostoïevski a ignoré toute sa vie le travail d’Edison, l’ingénieur américain et l’écrivain russe ont partagé un intérêt commun pour cette pensée spiritualiste, l’un faisant résonner la voix des revenants dans ses fictions, l’autre rêvant d’inventer un « nécrophone » (Baudoin 22) capable d’établir un dialogue entre les vivants et les morts. En Russie, la vitalité du mouvement spirite doit être associée à deux noms : celui d’Helena Blavatsky, future fondatrice de la Société théosophique, et celui d’Alexandre Aksakov, neveu de l’écrivain slavophile Sergueï Aksakov, qu’a personnellement bien connu Dostoïevski.
19Dans son livre Ghostly Paradoxes (2009), consacré à l’influence de ces courants spiritualistes sur les développements du roman russe, le chercheur Ilya Vinitsky propose le récit détaillé d’une séance de spiritisme qui s’est déroulée dans la nuit du 13 février 1876 chez ce même Alexandre Aksakov, ce dernier apparaissant comme l’un des grands noms russes de la pensée spirite. Parmi les participants regroupés lors de cette séance autour de la célèbre médium anglaise Madame Claire se trouvent trois écrivains : Nicolas Leskov, Piotr Boborykine et Fédor Dostoïevski. Le spectacle de l’écoute médiumnique semble avoir constitué pour ce dernier « une expérimentation psychologique et métaphysique, un test pour ses croyances et ses doutes » (Vinitsky 36, notre traduction). Durant cette même année 1876, Dostoïevski consacre dans son Journal d’un écrivain deux gros articles à la doctrine spirite. Ces deux textes tentent de formuler, sur un ton résolument ironique et ludique, la nature des nouveaux défis que l’essor de telles pratiques lance à la fois aux modèles scientifiques traditionnels et à la métaphysique religieuse.
20Néanmoins, dans Bobok, l’influence de la pneumatologie d’Emmanuel Swedenborg prime sur celle d’Allan Kardec. Exposée dans son De coelo et ejus mirabilibus et de inferno (1758), diffusée en Russie par Alexandre Aksakov, la doctrine du visionnaire suédois postule l’existence d’un Monde des esprits. Ce dernier est considéré par Swedenborg comme un « lieu moyen » (Swedenborg 311), c’est-à-dire comme une étape intermédiaire par laquelle tous les individus doivent passer pour accéder au Ciel ou à l’Enfer. Ces deux dernières régions sont d’ailleurs considérées par l’auteur suédois comme des états de l’âme avant d’être des lieux physiques. L’idée d’un état transitoire entre vie et mort se retrouve au cœur de la nouvelle de Dostoïevski :
Ici, c’est comme si le corps se ranimait une nouvelle fois, les restes de vie se concentrent, mais seulement dans la conscience. C’est – je ne sais comment exprimer ça – enfin la vie qui continue, mais comme par inertie. Tout est concentré […] je ne sais où dans la conscience, et ça se poursuit encore deux ou trois mois… parfois même six mois… (Dostoïevski 2016b, 944-945)
21Le dialogue de Bobok peut nous apparaître comme une « ménippée théosophique » (Vinitsky 121, notre traduction) tournant en dérision la doctrine swedenborgienne pour mieux en manifester l’incroyable fertilité imaginaire. Dostoïevski s’appuie en effet sur Swedenborg afin de subvertir la métaphysique traditionnelle : dans les visions du mystique suédois, le domaine spirituel conserve en effet des qualités sensibles et, pour ainsi dire, charnelles. Les âmes des morts peuvent ainsi émettre des sons, converser entre elles et se regrouper en Sociétés, qu’elles soient de type infernale ou angélique. Les visions swedenborgiennes mettent en lumière un processus dynamique de spiritualisation des individus passés de vie à trépas. Au cours de ce processus, les formes extérieures et les formes intérieures de chacun, ses apparences sensibles et ses processus mentaux invisibles finissent pas se confondre et par faire corps. Cette transformation affecte d’abord les visages et les voix :
J’ai vu quelques hommes récemment sortis de notre monde, et je les ai reconnus à leur face et au son de leur voix ; mais plus tard, quand ils se sont présentés à moi, je ne les ai plus reconnus ; ceux qui avaient été dans des affections bonnes, se présentèrent avec un beau visage, et ceux qui avaient été dans des affections mauvaises, avec une face difforme; car l’esprit de l’homme, considéré en lui-même, n’est autre que son affection, dont sa face est la forme externe (Swedenborg 334).
22Le narrateur de Bobok ne voit aucune face mais il entend des voix. C’est ainsi qu’il faut comprendre l’effort continu de caractérisation des voix qui traverse l’écriture du récit. Le dialogue des morts participe d’un mouvement d’extériorisation des contenus intimes, pensées et autres affections, dans lequel le timbre de la voix de chaque personnage apparaît comme l’ultime degré physique d’un corps en voie de spiritualisation.
23Les influences swedenborgiennes se ressentent dans bien d’autres écrits de Dostoïevski, à commencer par la description des visions de Svidrigaïlov dans Crime et châtiment (1866) ou encore dans Le Rêve d’un homme ridicule (1877). La manière qu’a Bobok d’inscrire les pratiques d’écoute spirites au cœur du texte polyphonique nous invite néanmoins à envisager le médiumnique, dans la perspective ouverte par Yves Citton, comme l’envers du médiatique, c’est-à-dire comme « l’inquiétude et l’impression de magie perçues par les sujets humains devant les excès de puissance générés par la médialité » (Citton 34). Le dialogue des morts peut en effet passer pour une allégorie de la nouvelle communication médiatique sous-tendue par le triomphe du journal dans la culture du xixe siècle.
Voix médiatisées
24Pour Roland Barthes, l’écoute en tant que pratique a vocation à s’installer au point d’articulation du discours et du corps, point qui, selon le sémiologue, désigne la voix comme la « corporéité du parler » (Barthes 1982, 226). Inversement, la lecture d’une transcription doit s’éprouver sur le mode de la perte :
[…] ce qui se perd dans la transcription, c’est tout simplement le corps – du moins ce corps extérieur (contingent) qui, en situation de dialogue, lance vers un autre corps, tout aussi fragile (ou affolé) que lui, des messages intellectuellement vides dont la seule fonction est en quelque sorte d’accrocher l’autre (voire au sens prostitutif du terme) et de le maintenir dans son état de partenaire (Barthes 1981, 11).
25Chez Dostoïevski, le motif central du dialogue des morts vient allégoriser ce sentiment de perte et la part de mélancolie qu’il comporte nécessairement. En brisant l’articulation du discursif et du corporel, l’hallucination auditive amplifie le défaut d’incarnation de la voix écrite, alors même que celle-ci semble devenue omniprésente au sein de la nouvelle civilisation du journal. In fine, c’est bien l’environnement médiatique de la nouvelle dostoïevskienne elle-même qui doit intéresser notre réflexion sur les imaginaires de la voix spectrale.
26Dans Bobok, l’étrange matérialité des voix entendues intrigue d’emblée le narrateur : « J’entendais quoi ? Des bruits sourds, comme si les bouches étaient sous des coussins ; mais, en même temps, tout à fait claires, et très proches » (Dostoïevski 2016b, 935). Cet effet d’assourdissement peut être interprété dans une perspective médicale comme l’indice du caractère hallucinatoire de ces sensations. Il peut aussi se voir rapproché des visions swedenborgiennes postulant un passage progressif de la matière vers l’esprit. Les termes employés par Dostoïevski dans son récit rappellent enfin le texte d’une célèbre fantaisie grotesque publiée dans la revue L’Époque en 1865 sous le titre Le Crocodile. Ce texte raconte les mésaventures d’Ivan Matvéitch, un fonctionnaire libéral avalé par un énorme crocodile lors de la visite d’une exposition zoologique. Enfermé dans le ventre de la bête, qui constitue lui aussi un lieu intermédiaire entre vie et trépas, cet intellectuel bavard ne cesse pas de discourir même si son instrument vocal sonne étrangement :
Sa voix était assourdie, toute fine et même criarde, et semblait fort éloignée de nous. C’était un peu comme quand un plaisantin, se retirant dans une autre pièce et plaçant sur sa bouche un banal oreiller, se met à crier et cherche à faire croire à l’assistance restée dans la pièce voisine que ce sont deux hommes qui s’interpellent par des cris dans le désert ou sont séparés par un fossé profond… (Dostoïevski 2015b, 1433)
27Les logorrhées d’Ivan Matvéitch contiennent une foule d’allusions aux théories sociales et aux opinions journalistiques de son temps, les années 1860 ayant bénéficié de la politique de libéralisation de la presse décrétée par l’empereur Alexandre II. Outre ces voix surgies de nulle part, et aux timbres si étranges, Le Crocodile et Bobok ont en commun une esthétique grotesque qui rappelle l’écriture de Gogol. Présenté comme une confidence autobiographique écrite à la manière du Journal d’un fou, le récit de 1873 se donne lui aussi comme une satire du monde journalistique.
28Dans le commentaire qu’il rédige pour l’édition académique des œuvres complètes de Dostoïevski, Vladimir Tunimanov montre que la polémique de Dostoïevski avec ses collègues journalistes débute en vérité dès l’incipit (Dostoevskij 1980, 402-411). Celui-ci contient une allusion transparente aux accusations de démence dont l’écrivain commence à faire les frais dans l’arène du débat public :
Un peintre m’a peint le portrait, hasard fortuit : « Quand même, il me dit, tu es un homme de lettres. » Moi – bon, j’accepte, et, lui, il m’expose. Je lis : « Venez voir ce visage maladif, à la limite du dérangement mental. Bon, je veux bien, mais quoi, quand même, tout de suite – une publication ? Quand on publie, il faut tout dans la noblesse ; des idéaux, tout ça, et là… Au moins, dis-le par allusions… » (Dostoïevski 2016b, 931)
29Ce paragraphe désigne l’actualité du Salon de l’Académie, où s’expose, à Saint-Pétersbourg, durant l’hiver 1873, le fameux portrait de Dostoïevski peint par Vassili Pérov. Le passage contient en vérité une citation extraite du quotidien La Voix (Golos) publié en date du 14 janvier 1873. Le feuilleton de ce numéro affirmait que le tableau peint par Pérov constitue le « portrait d’un homme tourmenté par une pathologie lourde » (Dostoevskij 403, notre traduction). Le titre du périodique La Voix, qui sert de tribune aux principaux adversaires idéologiques de Dostoïevski durant cet hiver 1873, nous livre ainsi une précieuse clé d’interprétation pour appréhender la dimension allégorique de Bobok.
30À notre connaissance, les études dostoïevskiennes françaises ont accordé très peu de place au support médiatique dans la genèse du roman polyphonique. Payé à la page, Dostoïevski fait pourtant partie de la cohorte des écrivains-journalistes qui, depuis Balzac, peuplent l’histoire littéraire européenne du xixe siècle. Au-delà de cette œuvre, c’est toute la littérature du xixe siècle qui connaît, avec l’essor de journal, un changement de paradigme :
Avec le xixe siècle, un nouveau modèle, qu’on pourrait dire « textuel », se substitue au vieux (et même antique) modèle discursif. L’œuvre littéraire n’est plus parole donnée à entendre, même par l’entremise de la page écrite, mais imprimé public et texte à lire, diffusé par les nouvelles structures de la communication que sont le journal ou le livre et intégré à un système complexe de consommations culturelles où il apparaît non plus comme une parole médiatrice, mais comme un objet médiatisé (Kalifa, Régnier, Thérenty, Vaillant 17).
31La plupart des écrivains-journalistes du xixe siècle se montrent particulièrement sensibles à cette problématique du deuil de la voix vive. À partir de 1866, tous les livres de Dostoïevski procèdent d’une parole orale transcrite sur le papier par une jeune sténographe, Anna Grigorievna Snitkina, qui deviendra en février 1867 la femme de l’écrivain. Au seuil de sa nouvelle La Douce, publiée en novembre 1876, Dostoïevski imagine la transcription impossible d’une voix intime en présentant le monologue d’un narrateur bouleversé par le suicide de son épouse. Pour justifier la forme « fantastique » de ce récit, l’écrivain imagine la « fiction d’un sténographe qui aurait tout noté » (Dostoïevski 2013b, 702), fiction de voix incarnée qui ne va pas sans rappeler les conditions de production du texte dostoïevskien lui-même et la collaboration de l’écrivain avec sa propre épouse dévouée.
32En quoi le dialogue des voix hallucinées de Bobok peut-il être lu, dès lors, comme une allégorie de la nouvelle communication médiatique imprimée où la voix écrite semble s’être définitivement substituée à toute forme d’oralité antérieure ? Au-delà des allusions au feuilleton du quotidien La Voix, c’est tout le texte de Dostoïevski qui s’avère saturé de références aux écrits des principaux journalistes de la décennie 1870. Comme le montre Vladimir Tunimanov dans son commentaire, la forme onomatopéique du titre serait elle-même une déformation du patronyme de l’écrivain-journaliste Piotr Boborykine. En faisant du redoublement de la syllabe « bok » le refrain des hallucinations auditives de son personnage, Dostoïevski semble avoir voulu désigner, en creux du texte, l’environnement médiatique – et polémique – qui préside à sa propre création. Si la satire dostoïevskienne parle « par allusions » (Dostoïevski 2016b, 931), contrairement aux adversaires qui manient explicitement l’insulte, alors les voix spectrales mises en dialogue constituent bel et bien une allégorie. On peut dire que ce ne sont pas à proprement parler des « voix » mais des citations masquées, des lambeaux de textes imprimés, des bribes d’énoncés qui renvoient à la poétique du journal en tant que médium.
33Durant cet âge d’or du journal imprimé qu’est le xixe siècle, l’objet possède encore une part d’inquiétante étrangeté. Nécessairement polyvocale, la construction du journal en rubriques fait de ce dernier une véritable « mosaïque de citations » (Kristeva 146) où la « pluralité des voix et des consciences indépendantes et distinctes » (Bakhtine 33) procède directement du caractère collaboratif de l’écriture. Dans ce dialogue des morts-vivants que constitue Bobok, Dostoïevski révèle sa fascination ambivalente pour le concert halluciné des voix médiatiques qui caractérise l’espace public en transformation de son temps.
34Censé capter la voix des morts, le « nécrophone » de Thomas Edison n’a jamais été retrouvé après la mort de l’inventeur. Peut-être n’aura-t-il jamais été, d’ailleurs, que le « prolongement imaginaire et fantasmé de la machine parlante bien connue de son auteur » (Baudoin 80). L’histoire de Bobok comporte aussi sa part d’irréalité. En effet, la fin du texte de Dostoïevski semble indiquer chez l’auteur la volonté d’écrire une suite au récit sous la forme d’une série d’articles susceptibles de prendre l’aspect d’un recueil de contes oraux. Composées sur le modèle du Décaméron ou des Contes de Canterbury, les confessions macabres auraient dû s’enchaîner au fil des parutions du journal Le Citoyen. La critique dostoïevskienne ignore les raisons de l’abandon d’un tel projet, la perte de ce texte-fantôme venant redoubler la présence fantomatique des voix inscrite au cœur du récit. Trois imaginaires de la voix spectrale auront particulièrement retenu notre attention durant cette étude. Lié à l’essor de la clinique aliéniste et aux développements de la psychologie, le thème de la voix hallucinée semble inscrire le dialogue polyphonique dostoïevskien dans un paradigme médical. Le deuxième imaginaire rappelle les croyances spiritualistes d’une époque où s’opère en Europe la diffusion des pratiques médiumniques. Le troisième imaginaire questionne le passage du médiumnique au médiatique : il nous rappelle comment la polyphonie dostoïevskienne vient s’appuyer elle-même sur un support résolument polyvocal, le journal imprimé. La prolifération des voix spectrales du journal devance, en ce sens, la médiatisation toujours croissante des échanges produite par l’essor des télécommunications, machines parlantes et autres technologies audiovisuelles. Vassili Rozanov ne s’y trompait pas qui associait, dans son article de 1911, le fonctionnement du dialogue dostoïevskien et ses fulgurances à une sorte de « télégraphie sans fil » (Rozanov 531, notre traduction). La métaphore technologique acquiert un sens particulier sous la plume d’un homme qui ne se consolait guère de ne jamais pouvoir entendre de ses propres oreilles la voix de l’écrivain préféré ailleurs qu’avec les yeux et sur la page imprimée d’un livre.
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Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Nicolas Aude
Ancien élève de l’ENS de Paris (2008), agrégé de Lettres modernes (2013), Nicolas Aude est docteur en littérature comparée (Université Paris Nanterre). Sa thèse s’intitule Les Aveux imaginaires. Scénographie de la confession dans le roman du xixe siècle (Angleterre, France, Russie). Ses recherches portent principalement sur Ann Radcliffe, George Sand, Charlotte Brontë, Fédor Dostoïevski, Maxime Gorki et Georges Bernanos. Il est l’auteur de plusieurs articles. Il a également coorganisé en mai 2018 à l’Université Paris Nanterre le colloque La Nation littéraire et l’épreuve du comparatism
e : le cas russe (actes à paraître dans la revue Silène).