Car poétique rime avec musique
La quête de la musique dans les Psautiers catholiques en vers français de la Renaissance
Résumé
La traduction en vers français des psaumes a été une entreprise poétique majeure de la Renaissance. Ce travail engageait prioritairement la restitution d’un sens mais il ne pouvait faire l’économie d’une réflexion sur les rapports des poèmes bibliques avec la musique qui leur était originellement attachée. Au croisement d’une forme antique perdue, d’une tradition de l’Église romaine – et, dans la seconde moitié du siècle, de l’ombre portée par la version dont la mise en musique à l’initiative de Calvin avait fait un étendard de la Réforme –, la possibilité d’une version catholique en vers français des psaumes mise en musique aurait pu occuper une place originale dans le paysage éditorial autant que dans les pratiques religieuses. Ce ne fut pas le cas, mais certains textes contemporains que cet article parcourt abordent ces questions ; ils témoignent des limites que l’on pose à une relation à la fois complexe, essentielle et finalement contournée.
Abstract
The translation of psalms into French verse was a major Renaissance poetic undertaking. It primarily involved the restitution of a meaning but it could not dispense with a reflection on the relation between biblical poems and the music that originally went along with them. A possible Catholic and musical version in French verse – at the crossroads between an ancient form fallen into oblivion or disuse, a tradition of the Roman Church, and, in the second half of the 16th century, the shadow of the version which, when it was put to music at Calvin’s instigation, became the standard of the Reformation – could have occupied an original place in the editorial landscape and in religious practice alike. This was not the case, however, but some of the contemporary texts examined here deal with these issues and testify to the limits set to a relation that is both complex and essential, but was eventually dodged.
Plan
Texte intégral
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1 L’étude fondamentale pour toute recherche su...
1La traduction en vers français des psaumes a été une grande entreprise poétique du XVIe siècle. De Marot à Desportes, nombreuses ont été les tentatives plus ou moins explicitement articulées à des remarques sur la musique psalmique et sur les formes du vers. En effet, le travail poétique, s’il engageait la restitution d’un sens – « un » sens, car les psaumes reposent sur diverses strates textuelles et diverses lectures qui conditionnent les choix du traducteur –, ne pouvait faire l’économie d’une réflexion sur les rapports de la poésie biblique avec la musique qui lui était originellement attachée. À un moment où une part non négligeable de la poésie française est chantée, une version catholique en vers français des psaumes se serait située au croisement d’une forme antique perdue, d’une tradition de l’Église romaine et, pour la seconde moitié du siècle, dans l’ombre portée de la traduction amorcée par Marot et progressivement achevée par Théodore de Bèze, traduction dont la mise en musique à l’initiative de Calvin avait fait un étendard de la religion réformée. Elle aurait pu occuper une place originale dans les recherches sur les relations que musique et poésie entretiennent. Ce ne fut pas vraiment le cas. Souvent, les textes qui approchent la question la contournent ; ils témoignent cependant de la perception qu’on put avoir d’un lien étroit mais complexe1.
Le psaume est musique
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2 Dolet 1979, 162.
2Textes et chants, dans la lointaine origine hébraïque du Psautier, sont indissociables. Étienne Dolet rappelle au lecteur de la traduction française de la paraphrase de Campensis (1542) : « Te voulons bien advertir, que ce mot Psalme, signifie proprement le son de la Harpe. Toutesfois le mot Hebrieu, Mizmor, signifie proprement Carme, Ode, Chanson. Mais nous appelons les Psalmes, pource qu’ilz ont esté chantés à certains instruments. » Et Dolet d’ajouter : « Mais c’estoit en telle sorte, que la modulation d’iceulx instruments preparoit et disposoit les affections de escoutants à plus pleinement entendre les parolles des sainctes Chansons2. » La musique psalmique a une finalité éthique ; sa forme répond au sens des poèmes et la pleine réception du texte est assurée par la musique.
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3 Vigenère 1991, 563 ; cf. l’entrée « Canticum ».
3Ce type de notations traverse le siècle, souvent de manière moins aboutie. En 1588, Vigenère accompagne son Psaultier de David torné en prose mesurée d’un « Dictionnaire du Psaultier » : « Psallo, mot Grec, qui signifie chanter sur quelque instrument, y accommodant sa voix […]. Nous disons communement psalmodier en nos Eglises, chanter les Pseaumes alternativement d’un cœur à autre, et les Cantiques avec les orgues3. » Le psaume ne peut être détaché d’un dispositif musical, mais sans mention d’une quelconque vertu éthique de la musique.
4Dans un ordre différent, Gabriel Dupuiherbault célèbre en 1555 David comme poète et musicien. On lit dans la dédicace « A touts fideles » de ses Psalmes de David :
Les Grecs diront ce, qu’ils vouldront de leurs Homeres, Pindares, Euripides et aultres poetes. Nostre David emporte sans controverse le pris de touts. [Manchette : « David poete lirique plus excellent que touts aultres. »] […] Des musiciens de jadis, nous en lisons merveille. […]4 Quel musicien avons-nous en nostre David ? Combien est il bon et subtil à toucher la harpe, et à emouvoir par sa harpe, ou moderer les affections humaines ? Combien de fois feist il revenir Saul à son bon sens, et le delivra il du maling esprit, par ses doulx sons5 ?
5David semble témoigner de la puissance éthique de la musique par un art dont le texte des psaumes seul demeure. Tout le problème est là : seul demeure un texte, alors que la puissance éthique n’est peut-être pas tant celle des mots que celle de la musique qui leur était associée. L’anecdote biblique sollicitée ne présente d’ailleurs qu’un David musicien devant Saül. Le poète est excellent, mais le musicien est efficace. Seule la pratique musicale davidique permet à Dupuiherbault de convoquer la puissance de son art si bien que le lien musique-poésie semble rompu. Et ce alors que l’actualité témoigne de sa vivacité.
6En effet, la dimension musicale du Psautier est alors rendue vivante par le choix calvinien d’une mise en musique unifiée des psaumes dans la traduction poétique de Marot dédicacée à François Ier, puis poursuivie à la demande de Calvin à partir de 1549 et finalement achevée en 1562 par Bèze6. Pour un réformé, les psaumes deviennent textes et mélodies. Mais quel lien musique et texte entretiennent-ils exactement ? Cependant, Calvin rappelle dès 1542-1543 que « S. Paul ne parle pas seulement de prier de bouche, mais aussi de chanter », affirmant que la musique « a une vertu secrete et quasi incroyable à esmouvoir les cœurs en une sorte ou en l’autre7 ». La musique du Psautier de Genève ne naît pas d’une réflexion sur ce que peut ou doit être la musique des psaumes en vers français au regard de leur origine hébraïque. La vérité hébraïque n’est en rien une vérité musicale non plus qu’une vérité poétique8. Elle n’implique aucune recherche sur un lien originel que l’on n’interroge plus9. Certes le chant n’est ni « leger ny volage », la musique est différente de celle « qu’on fait pour resjouir les hommes à table et en leur maisons » ; elle ne doit point être « instrument de paillardise, ne d’aucune impudicité » ; la mélodie doit être « moderée10 ». Mais les mélodies ne visent néanmoins pas à retrouver l’unité hébraïque perdue. L’association poésie-musique en vient pourtant à faire sens : les mélodies renvoient aux mots de la traduction qui, eux, renvoient aux mélodies. Ce tout constitue un horizon poético-musical que n’ignorent pas les poètes catholiques.
Le soupçon de la métaphore
7Si le psaume est, selon différentes modalités, musique, encore faut-il entendre le sens de cette affirmation avant d’aller plus loin. Flotte en effet une suspicion de glissement métaphorique.
8En 1542, Dolet ouvre la dédicace de la version en prose du Psautier par Olivétan en mobilisant le plaisir musical du « lecteur chrétien » :
11 Dolet 1979, 103.
Si gens curieux de leur plaisir mondain et addonnés à leur volupté cherchent les lieux [...] où coustumierement y a ample musicque et jeux de touts instruments […], je ne sçay chose soubs le ciel où un noble et Chrestien esprit puisse trouver plus parfaicte musicque qu’aux divins Psalmes de David. Mais qu’entends je par ceste musicque ? Ce qui s’ensuict. Si (quant au plaisir humain) tu te delectes d’une subtilité d’invention, d’une diversité d’arguments, d’une vehemence ou doulceur de propos, je te puis asseurer qu’en touts les Poëtes Grecs ou Latins ou vulgaires tu ne trouveras perfection de Poësie (interprete la, si tu veulx, musicque) qu’en ces Psalmes de David11.
9Poésie et musique semblent synonymes, mais le parallèle proposé est dans ces lignes un parallèle à vide. Il est en effet utilisé pour décrire les caractéristiques d’un texte poétique alors que Dolet édite un texte en prose. Si la poésie permet la métaphore musicale, les psaumes semblent l’appeler quelle que soit leur forme.
10Ce caractère métaphorique de mainte considération musicale doit fréquemment être pris en compte. On a ainsi vu Dupuyherbault célébrer poésie et musique davidiques. Cela ne signifie en rien qu’il envisage une transposition contemporaine de cette double compétence originelle. L’éloge des vertus de la musique se résout sous sa plume en un réseau métaphorique : « Nous avons la harpe et le rebec de David, ce sont ses psalmes, il ne fault plus que l’archet pour toucher. Et qu’est ce ? Nostre cueur, c’est le doigt, c’est l’archet, qui sonne la chorde12. » Il en vient à rabattre l’utilisation des psaumes sur « la lecture, estude, et meditation »13. La dimension musicale, centrale dans les premières lignes de la dédicace, est évacuée et avec elle toute réflexion sur la musique psalmique dans le cadre d’une version française14.
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16 Beaune 1587, ãiij ro.
11Cette attitude s’explique sans doute en partie par l’usage catholique du Psautier. Existe en effet une tradition du chant des psaumes latins lors des messes et offices. Cette tradition écarte la possibilité du chant des psaumes en français et, de manière significative : en 1563, la demande faite aux pères conciliaires de Trente pour obtenir l’autorisation du chant des psaumes français jusque dans les églises n’est pas reçue15. Le chant liturgique latin s’articule à une autre appropriation du texte saint à laquelle la traduction vernaculaire semble répondre. Renaud de Beaune, dans la dédicace de sa version du Psautier (1587), rappelle l’un et l’autre de ses usages ; le psaume « se chante en l’Eglise au milieu de la priere et adoration publique » et il « se medite en particulier […] en tous lieux et occasions16. » Support de la vie spirituelle intime, le Psautier français n’est donc pas, pour un catholique, occasion d’un chant.
De la musique perdue à l’horizon musical contemporain
12Si l’actualité musicale des psaumes n’est souvent que métaphorique, certains envisagent cependant pour leur écriture un horizon musical qui assurerait aux psaumes une sorte de complétude.
13Un rappel s’impose : Marot, qui écrit pour un roi catholique, affirme : « Or sont en l’air perdus les plaisants sons / De ceste Lyre, et non pas les chansons17. » Pour lui, seul demeure un texte qualifié de « chansons » dont il se réjouit que les études hébraïques revivifiées par François Ier l’aient rendu clair18. Ce qui compte, c’est le sens reconquis. La mise en musique, voulue par les réformés avant toute publication autorisée par le poète19, doit être dissociée de la perspective marotique telle qu’elle s’affirme au seuil de ses vers.
14Sans faire aucune remarque sur la perte poético-musicale que le Psautier hébraïque a connue, Gilles d’Aurigny semble pour sa part placer son travail poétique sur l’horizon d’une création musicale. En 1549, dans la dédicace à Henri II de ses Trente Psalmes du royal prophete David, la musique n’est pas uniquement métaphorique et si rien n’est dit de ce qu’elle était pour les Hébreux, elle semble bien devoir trouver une actualisation pratique qui fasse écho à ce qu’étaient les psaumes antiques.
20 Aurigny 1549, 3 vo. Sur ce Psautier et sur ...
Car puis qu’un Roy l’a [i. e. l’œuvre des psaumes] faict et inventé,
Il faut qu’il soit à un Roy présenté,
Pour estre veu sur les harpes et lutz20.
15Ces vers sont écrits à une date où la récupération des psaumes de Marot et leur chant en milieu réformé s’affirment. Si les Trente Psalmes sont bien un essai de publier un Psautier de reconquête, leur auteur ne peut faire l’économie de la dimension musicale. La restauration catholique confiée au roi passerait, entre autres choses, par le chant des psaumes d’un nouveau Psautier en vers français – les vers de Marot seraient abandonnés aux réformés qui les ont adoptés depuis une dizaine d’années21. C’est peut-être moins la musique originelle des psaumes qui impose cette stratégie que l’existence d’un Psautier devenu dissident mis en musique. Mais pour attendue qu’elle paraît être par Aurigny, la mise en musique n’est pas un horizon unique des Trente Psalmes ; à la fin du volume, des vers adressés « Au lecteur Chrestien » semblent même infirmer la dimension musicale si présente dans la dédicace au roi : « Lis donc, lis donc, c’est œuvre en diligence, / Œuvre dicté de par le sainct esprit22. » La mort d’Aurigny avant 1550 met fin à son initiative. Il y eut certes mise en musique par Didier II Lupi23 ; mais le musicien ne fait nulle mention d’un rapport spécifique entre psaume et musique. Il indique seulement vouloir, après avoir offert à son dédicataire des « chansons prophanes », guérir le mal par l’offre de « chants sacrez ».
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24 Les Cent Psalmes de David 1550. Sur l’écrit...
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25 Les CL Pseaumes du royal prophete David 155...
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26 Voir Les CL Pseaumes du royal prophete Davi...
16Le devenir musical du Psautier huguenot n’impose cependant pas à tout paraphraste catholique un horizon musical. Ainsi, lorsqu’en 1550 Jean Poictevin offre au cardinal de Lorraine ses Cent Psalmes de David, il n’évoque aucune mise en musique qui pourrait parfaire son travail poétique24. Ce silence n’empêche pas Philibert Jambe-de-Fer de proposer une mise en musique de sa paraphrase publiée par Michel Du Boys. Ces mélodies sont publiées en 1555 dans un recueil où les vers de Poictevin sont associés à ceux de Marot pour lesquels est conservée une mise en musique publiée en 1551 dans un volume réformé25. Les vers d’un catholique sont donc captés par un musicien et par un éditeur pour le moins favorables à la Réforme. Dans ce contexte confessionnel, le chant des psaumes en français est comme naturel. Aucun lien spécifique entre mots et notes ne semble cependant exister pour le musicien26. Là où Poictevin a complété les psaumes de Marot, Philibert Jambe-de-Fer complète leur mise en musique. L’horizon musical est celui d’un usage réformé du Psautier. La question archéologique d’une authentique unité poésie-musique est déplacée vers des mises en musique pour lesquelles le lien est beaucoup plus lâche.
17Les seuls qui aient eu ce regard archéologique sont ceux qui ont réfléchi à la possibilité d’introduire en français un vers fondé sur la quantité des syllabes. La perspective qu’ils ouvrent envisage une union de la poésie et de la musique en un tout ayant sens grâce aux effets produits. Pontus de Tyard est l’un des premiers à formuler l’espoir d’une telle unité. Dans son Solitaire second, ou prose de la musique, il affirme :
27 Tyard 1555, 133.
Non toutefois, que je croye estre impossible d’acommoder proprement la Musique figurée aus paroles […] : mais la dificulté de notre langage non encores mesuré en certeines longueurs ou brievetez de sillabes, et le peu d’egard que je voy y estre pris par les Musiciens, qui touts, ou la plus part, sont sans lettres, et connoissance de Poësie : comme aussi le plus grand nombre de Poëtes mesprise, et, si j’ose dire, ne connoit la Musique, me fait creindre que tard, ou rarement, nous en puissions voir de bons et naturels exemples27.
18La conjonction souhaitée du poète et du musicien nécessite une double compétence, poétique et musicale :
28 Tyard 1555, 155-156.
Je requerrois donq […] qu’à l’image des Anciens […] noz chans ussent quelques manieres ordonnées de longueur de vers, de suite ou entremellement de Rimes, et de Mode de chanter, selon le merite de la matiere entreprise par le Poëte, qui, observant en ses vers les proporcions doubles, triples, d’autant et demi, d’autant et tiers, aussi bien qu’elles sont rencontrées aus consonances, seroit dine [i. e. digne] Poëte-musicien, et témoigneroit que la harmonie et les Rimes sont presque d’une mesme essence28.
19Pour un tel art poétique, musique et chant seraient unis et liés au sujet abordé par des auteurs-compositeurs, encore que selon des modalités dont la part d’arbitraire n’est pas indiquée.
20Que l’amont poétique gréco-latin soit aussi hébraïque pour les poètes du temps, c’est ce qu’indiquent les premières pages de La Manière de faire des vers en François, comme en Grec et en Latin, de Jacques de La Taille : « Mais qui nous engardera d’en faire autant que les Hebreus, qui ont en leur langue (à ce que dit Josephe) premiers que les Grecs et les Latins, mesuré leurs syllabes et inventé les vers Heroiques29 ? » La Taille ne va pourtant pas au bout de la logique qu’implique son interrogation. Les psaumes ne sont pas évoqués dans son traité et lorsqu’il affirme la nécessité d’un lien fort entre sujet et forme du vers30, il ne dit rien de l’écriture psalmique.
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31 Du Bellay 1970, 112-113.
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32 Ronsard 1973, 44 et 48.
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33 Peletier du Mans 2011, 361. Nous modernison...
21Bien que souvent moins formalisées, ces préoccupations poétiques sont communes. Du Bellay invite en 1549 le poète à venir : « Chante moy ces odes incongnues encor’ de la Muse Françoyse, d’un luc, bien accordé au son de la lyre Greque et Romaine31. » S’agit-il d’une invitation à la mise en musique ? De l’affirmation du caractère intrinsèquement musical de l’ode ? Ronsard, dans l’épître « Au lecteur » de ses Odes de 1550, indique pour sa part que sa première ode est « imparfaite, pour n’estre mesurée » et envisage la (re)mise en usage de la lyre pour les accompagner32. Ces débats sur la forme de l’ode concernent les mises en vers français des psaumes. En effet, en 1555, l’ode est explicitement rapprochée des psaumes : « Si nous regardons les Psaumes de Clément Marot : ce sont vraies Odes33. » Mais à cette affirmation ne répond aucune réflexion sur la musique psalmique.
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34 Paris, Bibliothèque nationale de France, ms...
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35 Ibid., 1 ro-120 vo.
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36 Sur le système métrique de Baïf, voir Bette...
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37 « Lettres patentes et statuts de l’Académie...
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38 Voir Jeanneret 1969, 347.
22Dans un tel contexte de recherche d’une forme française épousant les caractéristiques de la poésie antique, le travail de Jean-Antoine de Baïf occupe une place centrale. Baïf inscrit sa première version en vers français du Psautier entre 1567 et 1569 en regard du succès du Psautier de Genève. Son « Psaultier [est] commencé en intention de servir aux bons catholiques contre les psalmes des haeretiques34. » L’intention affirmée se limite ainsi à une volonté de reconquête et Baïf ne donne aucune indication sur la forme poétique qu’il adopte. Or sa version des psaumes repose sur un système de longueur des syllabes qui tente de faire revivre la métrique gréco-latine. Le poète renouvelle l’expérience avec une version achevée fin 157335. Si l’on en croit ce qui se dit sur le pouvoir de la musique antique – et encore que ces vers ne soient pas placés en contexte musical –, les options métriques de Baïf sont propres à communiquer au verbe une puissance éthique absolue. En 1570-1571, il forme avec le musicien Joachim Thibault de Courville une Académie de musique et poésie où l’expérience poétique s’unit à l’expérience musicale36. Le projet vise à « remettre sus, tant la façon de la Poësie, que la mesure et reglement de la Musique anciennement usités par les Grecs et Romains », partant du principe que « où la Musique est desordonnée, là volontiers les mœurs sont depravez, et où elle est bien ordonnée, là sont les hommes bien morigenez »37. Le vers mesuré tel que Baïf l’entend a une destination musicale38, mais la musique est soumise aux choix métriques du poète. Si l’écriture mesurée n’est pas réservée aux versions psalmiques, elle aurait pu dans leur cas se colorer d’un imaginaire spécifique. Mais l’absence de réception large de cette forme poétique autant que l’absence de mise en musique d’un Psautier mesuré adopté par les fidèles sapent l’unité poésie-musique qui entend s’y manifester. Seul un vrai succès parmi les catholiques pouvait cautionner l’entreprise. La poésie psalmique mesurée dévoile, au cœur des conflits politico-religieux qui troublent la France, le caractère formel d’un projet dont la pierre de touche aurait dû être l’efficacité dans la maîtrise des passions et des mouvements de l’âme.
23Par ailleurs la plupart des poètes du moment ne suivent pas la voie du vers mesuré : pour eux le français n’a ni quantité ni accent. Sans rien dire de l’échec que connaît l’entreprise de Baïf, Guy Le Fèvre de La Boderie, évoquant les musiciens grecs dans sa Galliade, affirme
39 La Boderie 1993, 538.
[q]ue cil travaille en vain qui aujourd’hui s’amuse
Afin de retrouver la premiere façon,
Et les nombres et tons de leurs vieilles chansons39.
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40 La Boderie 1993, 519.
24Il témoigne de son scepticisme quant à la possibilité d’un transfert au vers français des qualités du vers grec qui sont aussi celles du vers hébreu40. C’est dans cette perspective qu’il faut entendre son propre projet poético-musical qui réduit considérablement les prétentions de l’association poésie-musique. Car La Boderie est loin de considérer comme inutile la mise en musique de poésies religieuses. Le succès genevois l’invite même à proposer une réponse sur un mode de concurrence indirecte. Voici ce qu’il écrit en offrant à Henri III ses Hymnes ecclesiastiques :
41 La Boderie 2014, 65-66.
Considerant que les Pseaumes de David traduits en nostre vulgaire, par la douceur de la Musique et du chant melodieux que l’on y a adjousté ont alleché et distrait non moins de vostre peuple que les assemblées et Presches des Ministres de la Religion pretendue reformée, Je me suis avisé pour un remede et contrepoison de traduire les Hymnes Ecclesiastiques, et autres Cantiques Spirituels […], à celle fin d’essayer par ce moyen de reduire et regaigner par la doulceur du vers et du chant ceux qui pour le plaisir de l’oreille et de la Musique se seroyent débandez du giron de l’Eglise Catholique. […] Et […], par un contrechant, comme jadis Orfée, m’opposer au chant pipeur des Syrenes. […] J’y eusse volontiers tout à la fois adjousté la Musique notée. Mais j’ay pensé qu’il seroit meilleur d’essayer premierement le jugement des nostres sur ce fait, et si les vers se trouveront dignes que quelques bons Musiciens se doivent employer à leur donner l’ame comme je leur ay donné le corps, et leur attacher des ailes aux flancs qui les facent voler par la bouche des hommes41.
25La Boderie ne propose pas le remplacement du Psautier de Genève par un autre Psautier42, mais entend « adjouter » – le terme lui-même dit un lien de subordination – une musique aux hymnes de l’église romaine qu’il traduit en vers français. Sa position est cependant ambivalente : d’une part, la mise en vers français ne semble pas suffire puisque la musique qui manque encore porte en elle une efficacité propre ; mais d’autre part, elle le pourrait. La Boderie la qualifie ainsi de « contrechant » tout en affirmant qu’il propose un corps sans âme. La frontière est difficile à percevoir entre ce qui est proprement musical ou uniquement poétique. Il n’en demeure pas moins que l’horizon d’une mise en musique est explicite. Cependant, Henri III ne la commandera pas, ni celle d’aucun Psautier français. Pourtant, le roi accorde une attention particulière à la musique dans les manifestations de sa piété et sa cour est ouverte à la mise en musique de textes spirituels. On sait ainsi qu’a existé une mise en musique du psaume cxxxvi (Super flumina Babilonis) dans la version de Du Perron chantée en novembre et décembre 158643.
26C’est dans ce contexte qu’on doit examiner l’option de Vigenère qui se lance à son tour dans une version du Psautier en 1587-1588. Pour lui, la perte subie par la poésie hébraïque concerne sa rythmique propre. Il écrit que le psalmiste déploie
44 Vigenère 1991, 15.
tant de belles et riches fleurs d’eloquence, que les plus delicats et elabourez Poëtes Grecs ny Latins ne s’y pourroient parangonner, nonobstant que les cadences et mesures des vers en aient esté tellement dissipées, confuses et ensevelies, que les Juifs mesme les plus doctes et curieux ne les ont jamais peu redresser ; si que ce qui leur donnoit l’ame et la vie, et le principal de la grace quant au contexte des paroles, en est absenté et banny44.
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45 Vigenère 1987, 3 vo.
27Sans indiquer la nature du lien de ces « cadences et mesures » avec la dimension musicale des psaumes non plus qu'avec une quelconque visée éthique, son projet de version en prose mesurée – il s’agit de vers blancs – est tout orienté vers la possibilité d’une mise en musique. Un an avant de livrer sa version complète du Psautier, le poète propose un échantillon « de quelque nombre de Pseaumes [...], tornez en prose mesurée, pour les pouvoir tant mieux accompagner au chant45. » En 1588 cependant, les choses ne sont plus si explicites, même si l’horizon musical semble encore ouvert. La mise en musique par les réformés est en effet louée :
46 Vigenère 1991, 118.
À la vérité ils meritoient beaucoup de louanges, de s’estre ingerez et mis en devoir de nous representer ceste excellente et divine Poësie Hebraïque, par des Vers tissus de nombres et cadences, assez delectables à oyr, plus commodes à reciter, plus faciles à apprendre par cueur et les retenir, et plus propres à mettre en Musique, pour les chanter et jouer sur les instrumens, qu’une simple Prose et oraison du tout solue46.
28Le regard de Vigenère sur le Psautier de Genève est significatif : sont uniquement soulignées les vertus mnémoniques du vers et la possibilité de mettre en musique les poèmes. L’écriture de Vigenère cherche pour sa part à rendre un rythme, manière de tendre vers la musicalité intrinsèque du texte original, mais aucune mise en musique ne complète son projet. Musicalisée par la mesure, sa prose n’en est pas pour autant musique. Une telle ouverture rythmique n’est d’ailleurs pas ignorée de certains prosateurs. Ainsi, en 1587, Renaud de Beaune publie-t-il une traduction des psaumes où des effets rythmiques soulignent la forme du texte47. La musique est absente, mais on ne peut, face à de tels choix, que songer au cantus obscurior, à cette ligne mélodique de l’art oratoire cicéronien48. Le potentiel musical de la phrase, s’il ne se réalise pas absolument, demeure sous-jacent et semble fixer un horizon.
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49 Voir Petey-Girard 2006, 64-70.
29Significativement, le premier Psautier catholique en vers français qui rencontre un public large et durable, celui que Philippe Desportes élabore entre 1587 et 1603 passe la question de la musique sous silence. Ce qui caractérise cette version est en revanche l’extrême musicalité d’un vers adapté aux goûts poétiques français du moment que le poète a en partie contribué à forger par son vers profane. Refusant le vers mesuré d’un Baïf autant que le vers blanc d’un Vigenère, il se soumet à la marque française du chant poétique, celle qui donne vie à la métaphore poésie/musique49 et adhère à l’affirmation formulée en 1555 par Peletier dans son Art poétique :
50 Peletier du Mans 2011, 341. Cf. Deimier 161...
Car si les Poètes sont dits chanter pour raison que le parler qui est compassé d’une certaine mesure, semble être un Chant : d’autant qu’il est mieux composé au gré de l’oreille que le parler solu : la Rime sera encore plus expresse marque du Chant : et par conséquent de la Poésie. Et la prendrons pour assez digne de supplir les mesures des vers Grecs et Latins, faits de certains nombre de pieds que nous n’avons point en notre langue50.
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51 Sur la douceur de Desportes, voir Halévy 20...
30Par ailleurs, si des musiciens se saisissent de ses vers, sa musique poétique passe avant cette étape par la douceur de la langue, par des choix de syntaxe et de vocabulaire51. Et le poète Salomon Certon ne s’y trompe pas, qui fait l’éloge de ses psaumes en ces termes :
52 Certon 1620, 224.
Quels accords aux sons de ce Roy respondans ?
Quelle note exquise imitant sa chanson ?
Quels essais leurs tons à la lyre accordans
Font ce royal son ?
Sont-ce pas les vers de ce chantre parfaict,
Dont le miel les cœurs de la France adoucit52 ?
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53 Voir Desmet 1994.
31Cependant, il ne s’agit que de célébrer une écriture. L’union de la poésie et de la musique n’est pas résolue avec cette ultime version humaniste en vers français du Psautier. Pour musicale qu’elle puisse être, elle ne propose qu’une musicalisation maximale de la langue et son chant est plus métaphorique que réel. Si les musiciens se saisissent de ses vers, leur travail n’offre qu’un complément, fût-il aussi, à sa manière, un achèvement53. Bien après la mort de Desportes en 1606, le musicien Denis Caignet publie une mise en musique du Psautier complet. Dans la dédicace, c’est l’union indispensable de la poésie et de la musique des psaumes qui est soulignée :
54 Caignet 1624, ãij ro-vo.
Sire, Ces divines chansons eussent en fin, en ceste traduction françoise, perdu l’effet du nom que leur auteur, le Roy Prophete, leur a donné, si elles fussent demeurées sans estre chantées. L’excellence des vers, jointe au merite du sujet, sembloit il y a longtemps souffrir une injure qui reprochoit à ceux de ma profession l’employ de leur temps et de leur industrie en ouvrages moins utiles. Ce reproche m’a fait tenter le travail de les ranger sous les loix de la Musique, et les rendre capables de faire par l’oreille plus doucement glisser leurs pieux charmes dans les cœurs : car leurs paroles animées des accords de la voix touchent plus vivement, et portent bien plus avant la consolation dans les ames54.
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55 Caignet 1624, [à]5 vo.
32Si ces lignes témoignent d’une parfaite conscience de l’implication musicale du mot « psaume », les considérations sont assez pauvres quant au lien établi entre texte poétique et musique. S’il y a manque lorsque les psaumes ne sont pas mis en musique, la musique que Caignet leur adjoint – l’approbation ecclésiastique du volume ne se trompe pas sur le lien entre la poésie et la musique et parle de vers « auquels [sic] en cette impression est adjousté un chant, ou modulation des vers »55 – ne semble pas, encore que ses vertus propres ne soient pas négligeables, devoir être spécifique. Les poèmes sont « rangés » « sous les loix de la Musique », mais ces lois et les pouvoirs qui leur sont joints semblent extérieurs aux psaumes eux-mêmes.
33Ce panorama déjà long et encore incomplet montre combien la mise en musique d’un Psautier en vers français au titre d’une union forte de la poésie et de la musique demeure un point aveugle. Face au succès des psaumes de Genève, poètes catholiques et surtout musiciens passent finalement à côté de ce qui est régulièrement donné comme essentiel aux psaumes, poèmes originellement musicaux. Nul poète-musicien n’apparaît pour réaliser un projet global. On assiste en fait à un déplacement de l’unité essentielle poésie-musique vers l’adjonction d’une musique à des poèmes, adjonction dont les traits caractéristiques n’ont rien de spécifiquement psalmiques. Le lien poésie-musique dont tous ont conscience, cette unité dont la nature peine à être précisée mais qui est presque toujours rappelée ne font finalement pas l’objet d’une réelle réflexion débouchant sur une réalisation pratique. Alors que la volonté de rendre en français certains des traits spécifiques de l’écriture psalmique est partout sensible, la question du lien entre poésie et musique, entre musique et poésie, demeure ainsi ouverte.
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Notes
1 L’étude fondamentale pour toute recherche sur la fortune poétique des psaumes en français à la Renaissance demeure l’ouvrage de Michel Jeanneret, Poésie et tradition biblique au XVIe siècle. Recherches stylistiques sur les paraphrases des psaumes de Marot à Malherbe (1969).
2 Dolet 1979, 162.
3 Vigenère 1991, 563 ; cf. l’entrée « Canticum ».
4 Dupuiherbault mentionne des figures antiques qui toutes exploitent la musique pour mouvoir les passions. Ces références profanes sont communes ; cf. Marot 1995, 98-99 ; Tyard 1555, 112-113 ; Vigenère 1991, 16 ; La Boderie 1993, 476.
5 Dupuiherbault 1555, ãiij ro – ãiiij ro. Marot avait fait des remarques proches dans la dédicace de ses Trente Pseaulmes (Marot 1995, 98 et 135-139).
6 On trouvera un aperçu de l’histoire de ce Psautier dans l’introduction que Pierre Pidoux donne au fac-similé des Psaumes en vers français avec leurs mélodies (Pidoux 2008, 7sq.). La position de Calvin sur la musique est exposée dans l’Institution de la religion chrétienne (livre III, chap. 20, § 31-33) et en 1542 dans son épître « A tous chrestiens » régulièrement imprimée en tête des éditions du Psautier de Genève. Sur cette position, voir, Harry 1957-1958 ; Garside 1951 et 1979 ; sur la mise en musique des vers de Marot, voir Millet 1997, 463-476 ; Candaux 1997, 477-481.
7 Calvin 1562, *iiii ro-vo et *v ro.
8 Jeanneret 1969, 340.
9 Calvin 1562, *v ro.
10 Ibid.
11 Dolet 1979, 103.
12 Dupuiherbault 1555, ãiiij vo. L’amont est paulinien et, chronologiquement sinon expressément, calvinien ; dans son épître « A tous chrestiens », le réformateur écrit : « Il nous faut souvenir de que dit S. Paul, Que les chansons spirituelles ne peuvent se chanter que de cœur » (Calvin 1562, *v vo-[*]6 ro ).
13 Calvin 1562, [ãã]8 vo.
14 On trouvera un mouvement similaire sous la plume pourtant poétique de Louis Des Masures (1557, 3).
15 Talon 1997, 836–837.
16 Beaune 1587, ãiij ro.
17 Marot 1995, 99.
18 Ibid.
19 Voir sur ce point les pages de Dick Wursten : http://www.clementmarot.com/psalmsmusic.htm.
20 Aurigny 1549, 3 vo. Sur ce Psautier et sur celui de Jean Poictevin dont nous parlons plus bas, voir Guillo 1990 et sur l’écriture d’Aurigny, Jeanneret 1969, 145-150.
21 Petey-Girard 2012.
22 Aurigny 1549, 56 ro.
23 Psalmes trente 1549 ; voir Guillo 1990, 367-368 et 379-380. Sur Lupi, voir Honegger 1970.
24 Les Cent Psalmes de David 1550. Sur l’écriture de Poictevin, voir M. Jeanneret 1969, 133-145.
25 Les CL Pseaumes du royal prophete David 1555. Sur ce titre, voir Guillo 1990, 372-373 et 391-392. Sur Du Boys, voir Peter 1978, 285-335. La musique conservée pour les psaumes traduits par Marot est celle publiée dans les Pseaumes Octantetrois de David 1551.
26 Voir Les CL Pseaumes du royal prophete David 1555, page de titre vo.
27 Tyard 1555, 133.
28 Tyard 1555, 155-156.
29 La Taille 1573, 3 ro.
30 Voir La Taille 1573, 14 ro-vo.
31 Du Bellay 1970, 112-113.
32 Ronsard 1973, 44 et 48.
33 Peletier du Mans 2011, 361. Nous modernisons l’orthographe. Sur le rapprochement entre l’ode et le psaume avant 1555, voir Girot 2002, 81sq.
34 Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 19140, 123 ro.
35 Ibid., 1 ro-120 vo.
36 Sur le système métrique de Baïf, voir Bettens 2013, 185-213 ainsi que les éléments rassemblés sur son site http://virga.org/baif/ ; sur l’Académie de musique et poésie, voir, parmi de nombreux travaux : Yates 1996, 47-79 et His 2000, 253-260.
37 « Lettres patentes et statuts de l’Académie de Baïf », dans Yates 1996, 437.
38 Voir Jeanneret 1969, 347.
39 La Boderie 1993, 538.
40 La Boderie 1993, 519.
41 La Boderie 2014, 65-66.
42 Voir Céard 2008.
43 Voir Paris, Bibliothèque nationale de France, ms Dupuy, 844, 430-431. Sur cette version, voir Goeury 2005. Sur les mises en musique de psaumes peut-être mesurés qu’aurait écoutées Henri III, voir Vauquelin de la Fresnaye 1885, 94-95.
44 Vigenère 1991, 15.
45 Vigenère 1987, 3 vo.
46 Vigenère 1991, 118.
47 Voir Beaune 1587.
48 Cicéron, Orator, XVIII, 57.
49 Voir Petey-Girard 2006, 64-70.
50 Peletier du Mans 2011, 341. Cf. Deimier 1610, 290-291.
51 Sur la douceur de Desportes, voir Halévy 2000, 315-339.
52 Certon 1620, 224.
53 Voir Desmet 1994.
54 Caignet 1624, ãij ro-vo.
55 Caignet 1624, [à]5 vo.
Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Bruno Petey-Girard
Bruno Petey-Girard est Professeur à l’université Paris-Est Créteil. Ses recherches portent sur les évolutions que connaît la littérature de spiritualité entre 1530 et 1630 ainsi que sur les mises en scène de la vie culturelle en France au cours de la Renaissance. Il a publié Le Sceptre et la Plume. Images du prince protecteur des Lettres de la Renaissance au Grand Siècle, Genève, 2010. De Philippe Desportes, il a édité les Psaumes de David en vers français (Paris, 2006) et codirigé l’édition des Premières Œuvres (Paris, 2014).