Car poétique rime avec musique
Poétique et musique : problèmes et méthodes
Résumé
Cet article cherche à répondre de manière très large, et par une réflexion méthodologique, à la question de la relation entre la rime, la poétique et la musique. Il rappelle que la musique n’est pas du son, mais le résultat d’une analyse complexe de la parole par un dispositif visuel qu’est l’écriture – écriture alphabétique et musicale. Musique et parole s’interrogent donc constamment de façon mutuelle dans les œuvres. Ce faisant, la rime ne peut avoir de valeur fixe et anhistorique : celle-ci dépend de la poétique mise en œuvre. L’article cherche à donner des pistes de réflexion pour un cadrage historique de cette question, aussi bien dans l’évolution de l’écriture musicale, celle de la poésie, celles de la musique, dans les liens qui sont à chaque fois tissés avec le visible.
Abstract
This paper tries to answer very broadly the question of the relationship between rhyme and music. First of all, music is not sound, as the word itself is the result of a complex analysis that has gone through a visual device: that of the alphabetical writing, but also through musical notation. Both are involved in the first musical writings that were elaborated to analyze songs that were sung in church. Thus, music and word are always interrelated, in a moving tension that is always reinterpreted. Rhyme cannot have a fixed value: it always depends on a poetics, which implies an interrelated conception of the visible, the audible and what one means by word. It implies a complete imaginary of the word such as it is enunciated by a subject. The papers hints at some practical realizations throughout western history.
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1Dans L’Africaine de Meyerbeer, Eugène Scribe aime les mots en -ique : Afrique, héroïque, Saint Dominique, hérétique… Pourtant, tout, dans sa manière d’écrire, montre que la rime n’a d’importance que pour terminer le vers par un appui métrique marqué. L’idée qu’un même élément sonore – qu’il soit phonologique ou mélodique, voire harmonique – pourrait transformer le sens des mots qui sont ainsi joints ne l’effleure pas, pas plus que Meyerbeer, qui met en musique son texte. Il y a certes un réseau sémantique propre à une œuvre donnée. Mais à l’époque, on considère généralement que mots et musique relèvent de deux ordres bien différents, qui requièrent la collaboration de deux spécialistes. On arrange les mots de sorte qu’ils tombent bien sur la métrique musicale, considérant que la musique n’a pas l’autonomie du langage articulé. Surtout, l’idée que l’on puisse trouver de la « musique » dans les mots et dans la rime leur est étrangère.
2Une telle pratique montre combien l’idée de « musique » comme celle de « poésie » est variable. L’idée que la rime puisse être de même nature que la musique, et que celle-ci ait une force signifiante comparable au langage articulé a une histoire dont les points de passage sont, en particulier, le choral luthérien, la conception rousseauiste du langage articulé et l’opéra wagnérien. Nous n’entrerons pas ici dans cette histoire complexe. Nous chercherons plutôt à cerner le contexte culturel dans lequel cette manière de voir peut naître. Dans l’écoute de la diction, du chant, comme de la production sonore instrumentale, il ne faut pas oublier l’écrit.
3Qu’est-ce que la musique ? Les réponses sont extrêmement variables. On peut s’amuser à en juxtaposer quelques-unes, à partir des traces écrites qu’elles ont suscitées.
Quelques représentations visibles de « la musique »
4La lettrine qui ouvre le psautier, c’est-à-dire le recueil des chants d’église, en donne une représentation visible. Le premier psaume est le Beatus vir, dont la première lettre est le « B ». Isabelle Marchésin a montré que les psautiers carolingiens construisaient cette lettre selon les proportions musicales. Se déploient dans son tracé des proportions simples, 1/2/3/4, c’est-à-dire l’octave, la quarte et la quinte, dans une somme qui fait 10, auxquelles il faut ajouter la proportion 8/9, celle du ton (Marchésin, Chap. 4). Pour ceux qui ont dessiné ce B en suivant ces proportions numériques, il s’agit, très clairement et très exactement, de représenter la « musique ». Elle est donc harmonie proportionnée, très abstraite, bien plus grande que la faible « musique » d’origine humaine. Le chant, celui des psaumes, peut la mettre en branle par l’intermédiaire du corps humain et de son harmonie propre, où la respiration puis le battement du pouls jouent un rôle essentiel. Cette conception perdure jusqu’à Dante inclus (Gally 161 sq.).
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1 Voir Psautier de Corbie. Amiens, ms 18 f°1 v°...
5Il s’agit d’une lettre historiée, dont le tracé montre ce qu’elle est : l’origine de la lettre et l’origine du texte qu’elle annonce – l’esprit (l’oiseau), lui-même relié à la main du psalmiste. La lettre elle-même, liée à la musique dans sa visibilité, engendre le texte à dire ou à psalmodier par l’intermédiaire de l’esprit et de celui qui écrit : il s’agit donc d’une traduction visible de ce qu’est, pour le moine qui chante, l’acte de chanter et son lien avec la « musique »1.
6Paul Klee propose pour sa part au XXe siècle une « traduction graphique » d’un air de musique. Il est clair que ces deux graphismes « sonnent » et donc « sont » d’une manière ou d’une autre, plus ou moins métaphorique, la « musique ». Il est clair que la « musique » désigne des choses différentes dans les deux cas, dans des contextes anthropologiques totalement différents : proportions du monde dans le premier cas, élan d’une ligne dans le second (Anger, 2011 a et b). Mais il apparaît aussi que le même terme, « musique », dans sa polysémie, permet d’interroger ces définitions implicites réciproquement et de les faire dialoguer.
Paul Klee, Cours du Bauhaus, Carnets manuscrits. 56
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2 Dans « Crise de vers », Mallarmé écrit : « L...
7Ajoutons à ces représentations une page de Mallarmé où, sur le mode « musical » emprunté à la disposition polyphonique inventée dans la partition (c’est-à-dire l’écriture de la musique), est consacrée l’impossibilité de dire le poème, ce qu’il appelle « la disparition élocutoire du poète »2, donc le contraire de l’acte de chant et, forcément, un autre statut de l’élément proprement sonore du texte.
Stéphane Mallarmé, Le Coup de dés
8Il faudrait évidemment s’attarder longuement sur ces tensions et les clarifier, mais le but ici est d’insister sur le rôle de l’écrit et de l’image dans l’élaboration de la frontière difficile entre le poétique et la musique.
La musique ne se réduit pas au sonore
9Ainsi, ce que l’on appelle « musique » ne se réduit pas à « du son », et de toute façon, « le son » est de la « matière sonore » : une fois que l’on a postulé cela, il faut savoir ce qu’est « la matière » : rude question. Même pour le rocker le plus accroc à la recherche de la transe produite par le son, même pour le musicien électronique le plus fasciné par le timbre que sa machine va produire, la nature même du son (vibration, timbre, enveloppe, sensation, etc.) est très difficile à cerner : c’est une recherche, celle du musicien, du physicien, plutôt qu’un donné. L’idée même de dire que le son produit par la voix a la même nature que le son produit par un instrument ou par un moyen enregistré est une position anthropologique loin d’être partagée par tous.
10On peut décider que la voix articulée n’a rien à voir avec un son instrumental ; on peut décider que le son émis par une membrane mécanique qui ne sait pas s’ajuster à son auditoire n’a rien à voir avec un son instrumental (Nicolas, chap. 4). On peut décider que la voix humaine est comparable au cri des animaux ou que, au contraire, porteuse d’un système articulatoire, elle est très différente d’une simple émission sonore. Dans ces débats se construit une conception de ce qu’est le corps humain, dans sa proximité plus ou moins grande avec le matériel et le mécanique, ou avec l’articulation qui est la première étape pour élaborer une pensée du signe. La capacité humaine à produire des signes du monde est une question que Platon, Aristote, les Stoïciens et la Bible (pour rester dans notre culture) ont tranchée dans des sens qui incitent au débat. Le rapport entre les signes vocaliques, leur nature matérielle, leur lien plus ou moins grand avec d’autres signes visibles n’est qu’une partie de cette immense question. Le propos n’est pas ici de les discuter, mais d’en rappeler l’existence.
11La question de la nature de la rime, des points communs entre le parler et le travail du sonore, s’inscrit à l’intérieur de choix anthropologiques. Il est sûr en tout cas qu’avec la rime se joue, certes la proximité avec la « musique » puisqu’elle relève d’un élément plus sonore même s’il est porteur de signifiance, mais aussi du même coup, la différence profonde entre la musique et le langage articulé : quelle que soit l’esthétique dans laquelle la rime survient, il apparaît qu’elle relève d’un jeu spécifique au langage articulé. L’idée de style lui est liée. Baudelaire, Verlaine, Mallarmé ont une approche de la rime très différente (Anger, 2015a) : de fait, aucun ne conçoit de la même manière ce qu’est « la musique » (Ibid.). Ainsi « la musique » n’est pas « du son », et quand bien même elle le serait, la rime (le phonème) n’est pas du son, et « la musique » n’est ni l’intonation ni la rime, que ce soit pour les poètes ou pour les musiciens. Le fait d’assimiler ces notions, en tout ou en partie, relève d’un choix anthropologique. Il est respectable, mais il doit être conscient et non pas imposé comme une évidence, ce qui est souvent le cas.
L’écriture peut être comprise comme la visibilité d’une théorie du sonore
12La « musique » désigne une entité extrêmement variable qui, au IXe siècle, était l’ordonnancement ultime du cosmos. Chez Baudelaire ou Mallarmé, elle participe de l’interrogation sur la nature sonore du langage articulé. La musique ne saurait être réduite à du son et intervient par l’écriture dans un jeu très complexe d’analogies avec le visible. On a tendance à ignorer la matérialité de l’écriture et à aller directement aux mots qu’elle rend visibles. Mais tous ces artistes (moine-copiste, écrivain vivant au temps de la rotative…) savent que l’écriture n’est pas transparente. Elle est le lieu d’une réflexion implicite sur le rapport entre le son, la parole, la vue, la visibilité de l’audible – réflexion qui est menée de manière large et approfondie dans toutes les cultures. Elle interroge ce qu’est la parole entendue, que l’on réduit trop facilement à sa dimension sonore à l’instar de la musique, ne sachant que faire ensuite de sa dimension conceptuelle qui est alors appréhendée comme un élément sans aucune assise matérielle, sans support. Il s’agit, là encore, de choix herméneutiques.
13Ce que l’on appelle « musique » est ainsi constitué par toute une série de dispositifs d’analyse. Son écriture est un lieu de rationalisation d’un savoir empirique, une manière de rendre visible une théorisation. Dans notre culture, la musique n’existe que parce qu’on peut la composer grâce à l’écriture. En s’abstenant de réduire la musique à du sonore et la « musique du langage » à la rime, il faut donc interroger notre pratique de l’écriture musicale d’une façon plus approfondie.
L’écriture de la « musique », comme l’écriture de façon générale, est une analyse de la parole
14On peut distinguer deux niveaux : celui de l’écriture proprement dite, et celui de l’écriture musicale.
L’écriture alphabétique est une analyse de la parole
15Le premier niveau est celui de l’écriture alphabétique que nous avons héritée des Romains. C’est une écriture qui est, au départ, phonologique : à un phonème correspond à peu près une lettre. On débat sur le fait de savoir s’il s’agit vraiment d’une écriture purement phonologique, c’est-à-dire d’une écriture qui résulterait de l’analyse de la parole dans sa seule dimension sonore à la différence d’écritures idéographiques. Anne-Marie Christin rappelle que cette écriture est bien davantage liée à l’analyse des déclinaisons, donc d’une analyse bien plus abstraite que celle qui concerne les simples articulations (Christin 53).
16Cette écriture a bien vite cherché à figurer des relations spatiales, c’est-à-dire visuelles. La disposition des lettres sur le papier, depuis l’écriture en scriptio continua jusqu’à l’invention de la ligne pour marquer l’unité métrique ou rythmique qu’est le vers, en relève. L’histoire de l’écriture (qui intègre l’imprimerie, les lettrines évoquées plus haut, la couleur, etc.) ne saurait permettre qu’on réduise la parole à du simple son, tout simplement parce que la parole est autant spatiale que temporelle.
17Le second niveau est celui de l’écriture de la « musique ». Nous n’entrerons pas ici dans le détail des questions que son élaboration suscite. C’est une pratique qui est immédiatement liée à l’analyse de la parole, puisque, dès le départ, il s’agit de noter le chant. Ainsi, puisque le « chant » relève de la musique, l’écriture construit d’emblée de manière visible une analyse de ce qu’est la « musique » dans son rapport à la « parole », elle-même comprise de façon alphabétique. Il est donc nécessaire de revenir sur quelques points essentiels.
L’écriture carolingienne de la musique comme analyse de la parole
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3 voir Boèce, chapitre 3.
18La « musique », pour les Carolingiens, nous l’avons vu dans ce « B » inaugurant les psaumes relève du nombre. En comprenant comment se forment les rapports sonores, c’est-à-dire la dimension sonore du nombre, il est possible de s’approcher au plus près de la structure du monde, qui est proportion. L’homme s’intègre dans ce monde, par son corps, en particulier sa voix et son pouls : c’est la musica humana. Par sa capacité spécifiquement humaine à produire à son tour de la musique, guidé par l’esprit, il peut intégrer son corps et ses émotions dans l’harmonie du monde : c’est la musica instrumentalis, de nature vocale comme instrumentale. C’est ce que montrent d’une manière admirables les lettrines du psautier. Baudelaire, Verlaine et Mallarmé dont nous parlions plus haut réinterprètent ces catégories que l’on trouve de manière très affirmée chez l’un des premiers théoriciens de la musique, Boèce3 : ils réinventent chacun une nouvelle musica mundana, une pensée de la musique qui leur permet de comprendre ce que parler veut dire, de sorte à élaborer une subjectivité propre. L’on pourrait affirmer que la musica instrumentalis est, finalement, un système de relations. Et ces poètes refont aussi chacun une musica humana, c’est-à-dire une anthropologie. Ce travail est toujours recommencé parce que le sonore est toujours signifiant et que la vraie question est de comprendre ce que veut dire signifier.
19Mais les Carolingiens ont aussi inventé comment écrire la manière de dire les mots dans le chant, contrairement aux Grecs qui utilisent des lettres plus ou moins liées à celles qu’ils avaient retenues pour leur alphabet, en transcrivant avec des moyens comparables la parole articulée, ou encore les nombres et donc aussi les sons organisés numériquement. Avant Platon, on savait déjà que la lettre, élément combinatoire totalement conventionnel, peut figurer l’analyse des phénomènes, quels qu’ils soient. Les Carolingiens, eux, comprennent que le chant n’est pas simplement la mise en œuvre de sons numériquement organisés : c’est aussi une énergie corporelle, un dynamisme, un élan humain qui unit et dépasse le simple niveau combinatoire. Toute parole relève de cette analyse et leur invention consiste à trouver un système pour rendre visible cette énergie corporelle. Le fait de la rendre visible permet aussi son analyse. Il y a donc l’étape de l’analyse de la parole dans son dynamisme et l’analyse de ce dynamisme de sorte à le rendre visible. Il s’agit d’un énorme chapitre de paléographie. Nous nous contenterons ici de quelques réflexions.
20L’écriture dite « neumatique », mise au point vers le IXe siècle, surmonte les syllabes à prononcer de signes plus ou moins nombreux, mais arrangés en système qui indiquent comment dire ces mots. Saussure a bien insisté sur le fait que signifiant et signifié sont inséparables : de fait, lorsque l’on parle, quelle que soit l’intonation des paroles, il est impossible de les séparer de leur sonorisation. L’écriture neumatique propose donc une séparation analytique de la parole (alphabet et signes marquant la manière de produire ces mots) en laissant le soin au chanteur, seul ou dans un chœur, de comprendre comment réunir dans l’élan de sa diction ce qui est séparé pour l’analyse. Ce faisant, l’écriture neumatique se donne les moyens d’analyser toute parole comme du « chant » : on ne distingue plus les genres dont la profération est liée à certaines circonstances, comme l’épopée, le poème lyrique, l’éloge funèbre, la danse instrumentale. Par ce choix d’écriture, le terme « musique » devient très vaste : il désigne potentiellement toute parole dans sa dimension sonore, entonnée. Il conviendra donc d’en donner les délimitations : celles-ci ne seront plus des a priori connus, liés aux types de chants et aux circonstances sociales dans lesquelles on les entonne ; elles considèrent implicitement l’acte de profération comme un tout, et devront trouver des méthodes pour rendre compte de ses multiples aspects.
21Cette ligne qui indique la manière de dire les mots – inséparable de fait de la parole – peut en être dissociée : elle est le fruit d’une analyse de l’élément proprement sonore de l’intonation (sachant que l’écriture alphabétique conserve aussi une dimension analytique sonore, celle des voyelles et des consonnes). L’écriture de la musique rend impossible l’opposition binaire entre les mots visibles et leur articulation sonore puisque d’un côté, la ligne alphabétique suppose des articulations sonores et de l’autre, la ligne d’intonation suppose les mots. Chanter les mots, c’est saisir ensemble un phénomène où l’on trouve du « son » de part et d’autre. Tout au long de la longue histoire qui nous sépare des Carolingiens, la ligne d’intonation va être l’objet d’une théorisation complexe qui accompagne en fait l’histoire de la conception du son et de la matière.
22À l’invention de cette ligne brisée s’adjoint, plusieurs décennies plus tard, une autre notion capitale, celle de note.
La note
23La note apparaît plus tardivement, vers le XIe siècle, comme analyse de ce que désignait la ligne neumatique. C’est une notion fascinante : on représente en effet par un point ce que l’on appellera de la « substance sonore ». Un point, visible, représente « du son ». Ce qu'est précisément ce « son » reste précisément à déterminer. Une « note », en soi, n’est rien d’autre que l’idée qu’on peut fractionner une continuité. Sans la matérialisation de lignes sur lesquelles poser ce point, la note s’avère même être dépourvue de hauteur. Kandinsky en a fait le point de départ de sa recherche picturale (Kandinsky 34 sq.). Cette « note » a des propriétés, des caractéristiques, lentement analysées, discrétisées, notamment la hauteur et la durée, lieu de ratio, et d’une rationalité qui n’est pas le seul fait du son instrumental. Toute parole, dans les différentes emphases avec lesquelles elle peut être prononcée, est susceptible d’avoir ces caractéristiques. Il y a donc toute une histoire de la théorisation du son musical dont les instruments sont le résultat. Le piano par exemple, invention des XVIIIe-XIXe siècles, est une théorie de la musique en acte – hauteur, durée, intensité, timbre, jeu polyphonique, etc. Il induit une tendance à assimiler la note à une hauteur fixe produite en activant une touche : tous les instrumentistes à cordes, tous les chanteurs savent d’emblée que les choses sont plus compliquées et qu’une note ne s’y réduit pas.
24Également et surtout, la note représente le silence, c’est-à-dire l’absence de son. C’est un coup de génie, qui intègre le silence à l’intérieur même de l’idée de musique. Ce dispositif d’écriture ouvre ainsi la possibilité d’une infinie réinterprétation de ce qu’est le son, aussi bien dans sa nature matérielle que dans son rapport à sa propre absence. Elle marque de manière très claire ce qui était avancé au début de cette réflexion : la musique ne se réduit pas au sonore.
25L’invention de la note, signe sans lien avec le mode de production du son (à la différence des signes neumatiques), constitue la musique en tant que lieu autonome, lieu de réflexion sur le fait sonore. Elle correspond à une ouverture maximale de la pensée du corps : celui-ci est évidemment nécessaire pour produire le son, mais son élan est devenu implicite. La note vise la substance sonore, quelle que soit la nature de sa part corporelle, de son étendue, qui est laissée à la liberté du musicien. C’est elle qui ouvre la voie à la composition. La musique symphonique, qui signifie et émeut sans aucun mot, est une lointaine descendante de cette note, elle-même contrepoids de deux tentations contraires : d’un côté, s’immerger dans la pure jouissance du son ou de la matière, et de l’autre, ramener cette matière sonore à un concept. Contre la première tentation, la note rappelle qu’il est possible d’y trouver du logos, de la substance ; contre la seconde, elle rappelle que le son, le corps, la matière échappent toujours à la violence d’un concept clair et totalisant.
La « musique » et la parole : une interrogation mutuelle sans cesse recommencée
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4 voir Stravinsky, 2000 ; Roland-Manuel, 1996 ...
26Cette écriture nous fait ainsi comprendre que « la musique » est ce qui interroge la parole. L’une ne peut pas être pensée sans l’autre. Évoquée par Stravinsky, Roland-Manuel ou Jankélévitch4, la musique « autonome » n’exprime qu’elle-même, elle est le pendant d’une interrogation radicale sur ce qu’est la parole articulée, coincée elle-aussi entre l’universel bavardage et les mots de la tribu.
L’apparition de la musique instrumentale autonome
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5 Voir sur ce point les textes édités dans Le ...
27Il suffit de regarder d’autres notations musicales (par exemple la notation chinoise ou la notation tibétaine) pour comprendre que l’on n’y conduit pas la même analyse de la parole. La ligne d’intonation s’est autonomisée. Il devient possible de noter, et surtout, de composer des musiques de danse, sans texte ; des réductions instrumentales de grandes œuvres vocales. Au XIXe siècle naît ce que Berlioz nomme le « genre instrumental expressif » de la musique « moderne », (Cohen et Gérard 63-68) c’est-à-dire la capacité, pour la musique instrumentale sans texte, de dire autant, sinon plus, qu’un texte en langage articulé. Selon Rousseau, comme la musique, le langage articulé signifie par ses accents ; ou encore selon Chabanon dès la fin du XVIIIe siècle, la musique est une langue. Herder, Hoffmann, Berlioz, Liszt, Wagner, Baudelaire ont cherché à comprendre son enracinement théorique5. De façon parallèle se trouve renouvelée l’appréhension de la valeur proprement sonore du langage, dont la rime est un cas particulier. Celle-ci mène à des recherches de genres littéraires extrêmes comme le lettrisme ou la poésie sonore.
28Il est donc impossible d’assimiler de la même façon rime et musique au IXe siècle et au XIXe : la simple histoire des mots le rappelle : rimer, rimoier, rimar, rïm, reim apparaissent au début du XIIe siècle. Ils sont synonymes de nombre, c’est-à-dire du latin rythmus, qui désigne une poésie syllabique par opposition à une poésie métrique, et qui est une partie de la musica. Les trouvères et troubadours chantent parce que le chant est beau et que la poésie l’est aussi, en lien avec son objet – l’amour, lui-même beau. Mais parallèlement, on apprend à noter les durées en musique, pas essentiel vers l’autonomisation évoquée plus haut : ces mouvements de spécification sont concomitants. Il faut attendre le XIVe siècle pour que le sens moderne de rime se dégage, désignant l’homophonie par opposition au rythme qui se restreint alors à la cadence. C’est aussi le moment où la poésie s’autonomise et sort du giron de la musique avec Dante, Machaut et surtout Eustache Deschamps (Gally, Ernst et Neuser). C’est Du Bellay qui distingue la rime et le rythme (Schmitt 88 sq.). La rime du XIXe siècle, elle, est le résultat de l’écoute nouvelle de la poésie sous l’influence de la symphonie orchestrale, capacité sonore de signifier sans les mots.
L’enregistrement
29La musique va pouvoir être tellement autonome qu’on va penser le son comme une simple matière physique, donc enregistrable. Survient quelque chose qui réinterroge la nature de la parole : un enregistrement met à mal l’écriture alphabétique comprise comme lieu de conservation de la voix, ce qu’elle était pour les Grecs (Svenbro 71 sq.). Il invite donc à reconsidérer, par le même mouvement, ce qui est visible dans la parole, ou à voir dans les lettres des éléments graphiques. Il faut y ajouter, plus récemment, avec les technologies numériques, la capacité d’afficher sur un même support un enregistrement sonore (qui est une image sonore du son), une image visible et un texte écrit. Dans le monde numérique, l’électricité et la structuration binaire de son flux permettent alors de confronter des éléments qui, il y a encore vingt ans, étaient pensés comme hétérogènes. Ces nouveautés technologiques invitent à repenser le lien entre son, texte et image. Mais elles découlent de l’analyse du son comme phénomène vibratoire de nature physico-acoustique, ce que la science expérimentale a théorisé au XVIIe siècle (Baskévitch). Elles découlent d’une analyse de la « matière sonore », celle que produit la science physique, qui n’est pas la matière aristotélicienne et qualitative que travaillaient les musiciens du Moyen Âge par leurs recherches de proportions. Elles entraînent la possibilité de réifier la parole prononcée sans distinguer sa nature articulatoire et conceptuelle (pour l’enregistrer techniquement) des phénomènes purement sonores.
30La parole prononcée est alors réduite à un signal électro-acoustique. S’y mélangent sans distinction de nature les articulations et les intonations : sur le plan visuel, le sonagramme ne distingue pas la parole articulée de la fréquence. Cela renvoie le concept dans un monde d’autant plus abstrait, évanescent, apparemment non-corporel, alors que le corps est nécessaire pour les dire (Dessons 43 et 81). Cependant, il faut comprendre que cette tension, que nous vivons fortement aujourd’hui, est en fait une relecture de la tension présente d’emblée dans la « partition », qui sépare théoriquement les mots et la manière de les dire tout en confirmant le fait que ces deux pôles ne sont pas distinguables.
31De plus, cette conception numérique apparemment très matérielle du son est la conséquence d’une analyse de la matière sonore dégagée dès le IXe siècle par l’écriture musicale, et la posant comme autonomisable et susceptible d’être traversée par des principes rationnels (la note). La conception très verbale de la parole qui l’accompagne est aussi le résultat de travaux dont sont partie prenante les poètes dit « grands rhétoriqueurs ». Ils ne pensent pas, et pour cause, la rime dans des termes musicaux : jouer avec les propriétés acoustiques du langage est, pour eux, marquer son autonomie par rapport à la « musique » et non pas en faire ; le son du langage n’a rien, à leur époque, de ce que proposera la physique acoustique et de la redéfinition de la « musique » qu’elle a entraînée. Tout cela résulte du coup de force de Dante qui concevait son poème comme une musique supérieure, nombrée mais pas sonore, reprise et clarifiée par Eustache Deschamps (Gally, Guichard). Dans cette progression, il faut aussi certainement ajouter les écrivains des textes luthériens de chorals (qui apprennent à penser qu’une mélodie renvoie immédiatement à des mots, même s’ils ne sont pas prononcés). Avant eux, l’introduction de la langue vernaculaire dans le monde de la musique avait également suscité une réflexion implicite très intense : qu’est-ce que les langues ? Ont-elles le même statut, la même grammaire que le latin ? Comment les chanter ? Comment relier la syntaxe vernaculaire à un monde mélodico-rythmique établi à partir du latin ? Questions redoutables que le fait de chanter pose de siècle en siècle. Il faut donc penser les choses historiquement, dans une histoire de la subjectivité et une histoire de l’herméneutique.
32On s’aperçoit ainsi qu’à l’histoire des relations entre musique et poésie correspond l’histoire de la conception de ce qu’est le langage articulé et de ce que signifier veut dire. La partition marque une analyse de la parole qui implique chaque style, chaque œuvre. Y est repensé le lien entre les mots et la manière de les dire (qui peut devenir musique et être appelée ainsi). Cette manière de dire les mots se situe entre une matière sonore éventuellement instrumentale, et sa discrétisation qui permet la maîtrise des paramètres retenus comme importants. L’opposition binaire et instable entre le parler (comme timbre vocal) et le chanter (donc comme musique), la conception de phénomènes comme l’intonation, la rime, la question de la ponctuation telle que nous l’entendons (qui situe un type de parole non musiqué), tout le travail sur les frontières, dérivent de cette analyse de la parole et donc, de l’écriture. Nous n’entrerons pas ici dans le détail de cette histoire. La rime chez Berlioz n’a pas la même valeur que la rime chez Wagner, et encore moins chez Scribe dont l’analyse de la langue est différente. Baudelaire conçoit la rime comme « touchant » à la musique, Verlaine n’en veut pas, tandis que Mallarmé est le seul à en faire le lieu possible d’un calembour.
33Musique et parole ne peuvent se définir que l’une par rapport à l’autre, dans les œuvres, et en s’interrogeant mutuellement. La longue histoire de l’une est la longue histoire de l’autre. La question se doit d’être abordée en cherchant à élaborer une histoire de ces relations, et certainement pas dans l’abstrait, dans l’absolu, en prenant le modèle grec et en le réinterprétant pour soi.
Le corps énonçant la parole
34Le dispositif d’écriture permettant de composer de la musique (donc de préciser ce que l’on entend par ce mot), s’avère ainsi infiniment ouvert. Il concerne le corps. La parole, en effet, est spatiale autant que temporelle : elle engage le corps autant que la mémoire. Si la disposition des lignes écrites de gauche à droite sur le papier marque d’emblée un lien entre le propos et son organisation visuelle (et donc matérielle), la ligne musicale, elle, s’oriente aussi en fonction du haut et du bas. Avant même que toute note ou tout paramétrage de la hauteur et de la durée (spécification technique de ce que l’on appelle le musical) existent, dès les premières virgae grégoriennes, est rendue visible une idée du rapport entre l’orientation du corps et l’orientation de ce qui est dit. Il serait utile de discuter de la valeur de cette orientation selon les choix paléographiques, ce qui serait un épineux problème. Mais il suffit pour notre propos, ici, de rappeler que cette analyse est écrite, visuelle. Elle suppose l’orientation du corps dans lequel résonne la voix, l’application de cette orientation, de façon métaphorique, au son, et également, une analogie entre le corps parlant ou chantant et la feuille de papier.
35Par conséquent, l’écriture musicale engage le corps, et un imaginaire du corps qui est essentiel dans la constitution de ce qu’est une voix. D’emblée, l’écriture « musicale » inscrit une tension entre la vox et la parole articulée ; entre la diction intime mais aussi partagée, unique ou celle de tout un chœur faisant entendre une seule et même « voix ». Là encore, un long développement serait nécessaire pour tracer l’histoire de cette notion difficile de vox. En tout cas, l’écriture inscrit une tension entre la voix et la parole. Dans cette tension féconde est constitué un sujet de la parole, que l’on peut analyser dans une œuvre ou dans son histoire.
36Le rapport entre musique, danse, théâtre, poésie est transformé par l’écriture. C’est une longue histoire. Rappelons que, à l’orée de notre culture, Saint Augustin, dans sa définition de la musica (Augustin 33-35), inclut la parole oratoire (celle de l’avocat), la pratique du danseur, la musique instrumentale (de la cithare), aussi bien que le chant des psaumes, parce que c’est l’autonomie de la production qui est justement en jeu, tout comme le regard désintéressé et unifiant qui est porté sur ce que l’on appelle « musique ».
Conclusion
37L’invention de l’écriture marque visuellement l’impossibilité de dire en vérité, l’impossibilité d’une adéquation complète entre énonciation et énoncé. Platon a consacré sa vie à ce bouleversement (Svenbro 98 sq.). Cette fracture, cette tension est comme prise en charge, voire affirmée par l’invention de l’écriture musicale, qui y ajoute deux autres fractures : la première est l’écart, artificiel mais extrêmement productif, qui est posé entre les mots et la manière de les dire ; la seconde est le rapport ouvert, appelant une interprétation sans cesse renouvelée entre la substance sonore et sa théorisation, tension que l’invention de la note matérialise. Cette écriture spécifiquement musicale rejaillit sur l’imaginaire de l’autre parole, celle qui sera comprise comme non-musicale. Il existe donc trois tensions dont chaque pratique de l’écriture et de la diction doit tenir compte. Ces tensions sont périlleuses et n’aboutissent pas nécessairement à un équilibre. La manière dont chaque texte les comprend relève d’une anthropologie.
38Par conséquent, l’opposition entre poésie parlée et musique chantée n’est pas pertinente de façon absolue et non historique. La valeur de la rime est infiniment variable, de même que celle de la musique ; et il est très difficile de généraliser : une approche écoutant la spécificité des choix de chaque œuvre semble beaucoup plus heuristique. La question sur laquelle cette approche débouche est en effet celle du sujet ainsi construit.
39Il est donc nécessaire de toujours se demander comment « musique », écrite ou enregistrée et travaillée, et « parole » se définissent l’une par rapport à l’autre à un moment de l’histoire donné, dans une œuvre donnée, et comment leur ajustement mutuel ouvre son existence à quelque chose que l’on peut nommer « le corps ». La réponse ne peut être qu’historique, dans la relation spécifique créée par les œuvres.
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6 Voir Les Fleurs du mal, et tout particulière...
40La valeur de la rime par rapport à la musique doit donc être sans cesse réinterrogée. Ainsi, Baudelaire, habitué à flairer « dans tous les coins les hasards de la rime » (« Le soleil », dans Tableaux parisiens), fait rimer lubrique et cynique, ou musique et rythmique (« Une charogne »)6 : il est clair que le prolongement sémantique de la rime est pris en compte. Scribe, dans l’Africaine, lorsqu’il multiplie à un moment les rimes en -ique n’y cherche qu’un écho cadentiel et aime la voyelle fermée / i /, qui sera favorable au chanteur auquel elle est destinée. Scribe écrit pour Meyerbeer, compositeur dont la conception de ce que doivent être des mots à chanter s’avère très précise ; Baudelaire, lui, pense certes que la poésie « touche à la musique » (Projet de préface aux Fleurs du mal) mais il n’imagine pas mettre en musique ses poèmes.
41Ainsi l’écriture, et notamment l’écriture alphabétique, impose une séparation de la parole entre ce qui peut en être visible et ce qui ne l’est pas. L’écriture de la musique impose une nouvelle séparation entre les mots et la manière de les dire, et, à propos de cette dernière, entre deux inconnus qu’il faut sans cesse penser à nouveau, l’inconnu qu’est le son et l’inconnu que sont ses paramètres d’analyse. Ces séparations impliquent, de la part du sujet parlant, une confrontation au vide qui les articule ; elles sont une invitation à retrouver, autrement et dans un émerveillement renouvelé, la dimension spatiale, c’est-à-dire corporelle, de la parole – ce que travaillent tous les grands auteurs.
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Notes
1 Voir Psautier de Corbie. Amiens, ms 18 f°1 v° vers 800. http://bvmm.irht.cnrs.fr/consult/consult.php?mode=ecran&reproductionId=15077&VUE_ID=1385781&panier=false&carouselThere=false&nbVignettes=4x3&page=1&angle=0&zoom=&tailleReelle=
2 Dans « Crise de vers », Mallarmé écrit : « L’œuvre pure implique la disparition élocutoire du poète, qui cède l’initiative aux mots ». Stéphane Mallarmé, Œuvres complètes. Paris : Gallimard Pléiade, 1945. 366.
3 voir Boèce, chapitre 3.
4 voir Stravinsky, 2000 ; Roland-Manuel, 1996 ; Jankelevitch, 1974.
5 Voir sur ce point les textes édités dans Le Sens de la Musique (Anger 2006).
6 Voir Les Fleurs du mal, et tout particulièrement les poèmes LXXXVIII et XXVII.
References
Quelques mots à propos de : Violaine Anger
Violaine Anger est ancienne élève de l’École normale supérieure, ancienne élève du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, maître de conférences habilitée à diriger des recherches à l'Université d'Évry et à l'École polytechnique. Membre de POLART et du Centre d’Études de l’Écriture et de l’Image, chercheur au CERCC, Centre d’Études et de Recherches comparées sur la Création, Equipe d’accueil 1633. Elle est notamment l’auteur de Le Sens de la musique, Paris, 2006, Sonate, que me veux-tu ?, Lyon, Ens éditions, Lyon, 2016 ; Berli
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